Le futur des taxis sans conducteur peut-il vraiment se jouer sur les autoroutes américaines ? Voilà une question qui semblait presque farfelue il y a à peine une décennie. Pourtant, aujourd’hui, Waymo, pionnier dans le domaine de la conduite autonome, annonce un bond en avant majeur : ses robotaxis circuleront désormais sur les freeways reliant les plus grandes villes de Californie et d’Arizona. Que cache cette avancée technologique soudaine ? Quels sont les enjeux réels pour les usagers, les villes, et même la concurrence ?
Le parcours de Waymo commence il y a seize ans dans la baie de San Francisco, lorsqu’une poignée d’ingénieurs de Google rêvaient déjà de voitures sans pilote. Depuis, la société a étendu ses tests à plusieurs métropoles, et ses robotaxis sont devenus synonymes de mobilité urbaine à Phoenix, Los Angeles ou San Francisco. Pourtant, une barrière persistait : l’entrée sur les légendaires autoroutes américaines, ces rubans d’asphalte à la circulation rapide et aux scénarios inédits. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour franchir ce seuil, et qu’est-ce qui a changé ?
Waymo affirme aujourd’hui que traverser les freeways réduira de 50% le temps de trajet pour bon nombre de courses, notamment vers les aéroports comme celui de San Francisco ou de San Jose. Ce gain pourrait bouleverser l’adoption du robotaxi auprès d’un public plus large, entre banlieues et hypercentres. Mais, la société garde la main sur le déploiement : seuls certains volontaires, préalablement sélectionnés via l’application, pourront expérimenter ces nouveaux trajets. La prudence reste donc de mise. Peut-on vraiment parler de « révolution » quand l’accès reste limité, et que la question de la sécurité n’a de cesse de ressurgir ?
Waymo élargit son terrain de jeu, mais la route vers l’autonomie totale sur autoroute reste semée d’embûches.
A l’écoute des explications des dirigeants de Waymo, on comprend mieux la complexité de l’exercice : la conduite sur autoroute ne consiste pas seulement à maintenir une vitesse – il s’agit surtout de gérer l’imprévisible à 120km/h. Selon le co-PDG Dmitri Dolgov, « maîtriser tous les scénarios, à grande échelle et sans humain pour rattraper une erreur, a nécessité des années de travail axé sur la fiabilité et la sécurité. » Les ingénieurs soulignent que les situations critiques y sont plus rares que sur les routes urbaines, donc plus difficiles à tester en conditions réelles. D’où le recours massif à la simulation et aux pistes fermées pour entraîner l’intelligence artificielle.
Mais les risques spécifiques des autoroutes ne s’arrêtent pas à la technologie. Pierre Kreitmann, ingénieur logiciel principal, rappelle que le plus grand défi reste peut-être la « transition » entre milieu urbain et autoroute, où le flux de circulation et la psychologie des conducteurs humains diffèrent du tout au tout. Les protocoles de sécurité, étendus en collaboration avec des entités comme la California Highway Patrol, montrent que l’intégration de ces véhicules sur des axes aussi stratégiques est un défi bien plus collectif qu’individuel. Sommes-nous, en tant que société, prêts à voir ce type de véhicules prendre place au milieu de notre quotidien motorisé ?
Waymo veut rassurer : la société a testé ses véhicules avec ses employés et sur des circuits fermés pendant des années, peaufinant la transition entre rues locales et autoroutes, ainsi que la communication avec les autorités locales. Reste une question cruciale : la technologie saura-t-elle faire face à l’imprévu ? Un accident sur la voie rapide, des comportements humains imprévisibles, autant de scénarios qui pourraient fortement ternir l’image de ces nouveaux taxis autonomes, voire freiner leur adoption massive.
Au fond, l’ouverture de ces axes à la flotte de Waymo sonne-t-elle le début d’une nouvelle ère pour la mobilité urbaine et interurbaine, ou bien n’est-ce qu’une étape supplémentaire dans un marathon parsemé d’obstacles, réglementaires comme technologiques ? L’avenir des transports est-il déjà en train de s’écrire sous nos roues, ou ce grand saut sur les autoroutes ne serait-il qu’un coup d’accélérateur prudent, en attendant le véritable virage de la voiture autonome ?
Source : Techcrunch




