Le secteur de la tech peut-il vraiment braver la tempête politique américaine et défendre ses ambitions en pleine paralysie du gouvernement fédéral ? C’est la question que soulève la stratégie audacieuse de Navan, autrefois connue sous le nom de TripActions, qui vient tout juste de déposer une mise à jour de ses documents d’introduction en bourse (IPO) auprès de la SEC, alors même que Washington est à l’arrêt.
Comment se fait-il que Navan poursuive sa démarche d’IPO malgré l’absence d’une supervision classique de la part des autorités boursières ? La réponse se trouve dans une récente règle permettant aux sociétés en quête de cotation de continuer à avancer même lorsque la SEC est paralysée : après dépôt des documents, l’enregistrement devient effectif par défaut sous vingt jours, sans contrôle approfondi… à moins qu’un examinateur décide plus tard de réouvrir le dossier. Cette sécurité, parfois jugée hasardeuse par le marché, marque-t-elle le début d’une ère nouvelle pour les introductions en bourse ?
Pourquoi Navan choisit-elle de se jeter à l’eau alors que de nombreux experts prévoyaient un gel complet du marché des IPO avec la paralysie gouvernementale ? Plusieurs sources, relayées par Bloomberg, suggèrent que la plupart des candidats à la bourse préfèrent attendre un feu vert formel d’un agent de la SEC. Navan, elle, semble vouloir jouer la carte de l’anticipation et de la confiance, au risque d’ouvrir la voie à une nouvelle norme… ou de s’y brûler les ailes.
Navan, en choisissant de contourner la paralysie administrative, mise gros sur la confiance du marché et la flexibilité réglementaire.
Mais à quoi joue exactement Navan ? Son dossier actualisé indique la vente de 30 millions d’actions (auxquelles s’ajoutent 7 millions revendues par des actionnaires historiques) dans une fourchette de prix comprise entre 24 et 26 dollars. La startup, soutenue par des géants du capital-risque comme Lightspeed, Andreessen Horowitz et Greenoaks, pourrait alors engranger plus de 960 millions de dollars et viser une valorisation vertigineuse de 6,45 milliards. Est-ce de la témérité ou une excellente lecture du timing financier ?
Derrière cette ambitieuse opération, quels sont les fondamentaux économiques de Navan ? Sur les douze derniers mois, l’entreprise annonce un chiffre d’affaires de 613 millions de dollars (+32%) pour une perte nette de 188 millions. Un profil typique de licorne en mode croissance accélérée, mais la rentabilité semble encore bien loin. Peut-on vraiment convaincre la bourse alors que les comptes restent dans le rouge ?
Enfin, Navan a refusé de commenter sa démarche auprès de TechCrunch, laissant planer le doute sur l’état d’esprit de la direction. Provocation, opportunisme, ou simple pragmatisme dans un paysage où les règles du jeu évoluent sous la pression des crises politiques ? Le cas Navan fera-t-il école, ou restera-t-il une exception dans une période trouble pour les IPO technologiques ?
Face à cette prise de risque méthodiquement calculée mais entourée d’incertitudes, la question reste entière : les investisseurs suivront-ils sans réserve une entreprise prête à s’affranchir des garde-fous classiques lors de son entrée en bourse ?
Source : Techcrunch




