Le secteur automobile électrique est-il à l’aube d’une véritable révolution, ou Ford tente-t-il désespérément de jouer son va-tout ? En annonçant un événement majeur prévu le 11 août dans le Kentucky, le constructeur promet rien de moins qu’un “moment Model T” pour sa future gamme de véhicules électriques abordables. Mais derrière le spectacle, quelles sont les réelles ambitions, et surtout, les chances de succès ?
Jim Farley, PDG de Ford, se veut conquérant malgré des chiffres inquiétants : la division électrique du groupe vient d’enregistrer une perte de 1,3 milliard de dollars au deuxième trimestre 2025. Les deux modèles phares, F-150 Lightning et Mustang Mach-E, peinent à séduire, tandis que le climat politique sous l’administration Trump II semble moins favorable que jamais aux véhicules zéro émission. Doit-on craindre une impasse pour l’un des pionniers de la mobilité américaine ?
Pourtant, Ford jure avoir l’atout gagnant : un projet mené tambour battant par un ancien cadre de Tesla, Alan Clarke, épaulé par des talents venus de Rivian, Apple et Lucid Motors. Un “skunkworks” secret qui travaille sur une plateforme low-cost censée bouleverser le marché. Mais pourquoi autant de secrets ? Ford refuse toujours de donner des détails concrets, même si l’on sait désormais qu’un pick-up électrique de taille moyenne devrait ouvrir le bal en 2027.
Ford fait le pari risqué qu’une équipe de top talents peut créer la “Model T de l’électrique”, mais pourra-t-elle vraiment changer la donne aussi tard dans la partie ?
Alors que Ford peine à rassurer sur la viabilité et le calendrier de son projet, la concurrence ne reste pas inactive. Tesla prévoit de commercialiser dès cette année un Model Y minimaliste et plus abordable. General Motors relance la Chevy Bolt dès l’an prochain, et la start-up Slate Auto, fortement soutenue par Jeff Bezos, mise sur un pick-up électrique à moins de 20 000 $ qui pourrait arriver sur le marché dès 2026. Ford est-il déjà en retard sur la course aux modèles grand public ?
Le marché américain affiche aujourd’hui un vrai manque de modèles électriques sous la barre psychologique des 30 000 dollars. Mais dans deux ans, lorsque Ford sera fin prêt, cet avantage risque d’avoir fondu comme neige au soleil. Peut-on encore parler de disruption si l’entreprise arrive après tout le monde, surtout avec un projet lancé dans un contexte politique et économique complexe ?
Reste finalement la question de la promesse de “nouvelles expériences numériques personnalisées”. Marketing ou réelle innovation ? Ford n’a jamais été très bavard sur la part logicielle de ses véhicules, tandis que la concurrence investit des milliards dans des cockpits intelligents et des services connectés à forte valeur ajoutée. Le pari de Ford passera-t-il par la technologie autant que par le prix ?
En attendant le 11 août et les révélations promises, on est en droit de se demander si cette annonce ne cache pas, derrière les grands mots, une course de rattrapage anxieuse. La révolution tant espérée sera-t-elle portée par Ford, ou le constructeur court-il derrière une époque en train de lui échapper ?
Source : Techcrunch




