Aujourd’hui, les titans de la technologie nous offrent un marathon d’innovations, de scandales et de régulations où, paradoxalement, l’humain est à la fois l’acteur principal, l’alibi et le grand oublié. Qu’il s’agisse de contrôler la personnalité d’une IA chez OpenAI, de fliquer l’éducation des chatbots en Californie, ou de tester la promesse (et les bugs) du nouveau cloud façon Blacksmith, une constante émerge : la reconnaissance tardive et souvent maladroite que l’algorithme fabrique, mais que l’humain subit, corrige… ou s’indigne.
Voyez la Californie qui, tel un parent débordé, enfile le costume de « contrôle parental pour IA » avec sa loi SB 243. On veut protéger les plus fragiles des excès linguistiques et psychiques des robots, alors que les CEOs de la Silicon Valley se rêvent déjà en démiurges d’une humanité reprogrammée à coups d’API. Dans le même élan, Uber, champion autoproclamé du « move fast and break things », prouve qu’en 2025, la mobilité inclusive reste un doux mirage pour des milliers de personnes handicapées, contraintes de quémander leur droit à une course sans discrimination devant la justice (lien).
Au même moment, pendant que Meta exhibe ses dernières lunettes connectées (Ray-Ban Meta 2) censées gentiment vous flatter l’ego (ou la recette du chef), la démonstration publique se transforme en farce technologique sur fond de Wi-Fi asthmatique et IA bredouille. Ironie suprême : l’accélération aveugle du « vibe coding » (lire ici), saluée comme le nouvel eldorado du developpement, produit surtout du déchet numérique — et un nouveau prolétariat surqualifié : les « Marie Kondo du bug IA ». Le progrès ? Certainement… mais à condition de prier pour que le copilote électronique n’ait pas décidé d’imiter le stagiaire vendredi-soir à 17h.
La technologie rêve d’émancipation, mais son mode d’emploi est toujours écrit par l’Homme — trop souvent à la truelle.
Derrière cet apparent tohu-bohu, une même inquiétude travaille notre ère connectée : jusqu’où la tech peut-elle nous promettre l’égalité, la sécurité, voire le génie créatif, si la réalité du terrain, des lois ou du hardware fait échouer la promesse aux portes de la société ? Le Népal croyait réguler les réseaux sociaux par décret : bilan, les morts sur le pavé et la jeunesse dans la rue. L’Inde pense éradiquer le jeu d’argent numérique : il ne fait que se souterraniser. Même l’espace, que l’on croyait vierge, nous rappelle à l’ordre avec des cailloux de 200 mètres (coucou QK1) qui rappellent, en toute modestie, la précarité de nos certitudes scientifiques et managériales.
Là où la Startup Battlefield fait défiler ses licornes du futur sous les projecteurs, on devine la dure leçon : innovation rime souvent avec improvisation, et la tentative de verrouiller l’humain — via l’algorithme, la régulation, la startup nation ou la super-lunette branchée — se retourne, tôt ou tard, en boomerang social, juridique ou éthique. La tech n’est pas (encore ?) une boîte noire qui s’écrit toute seule : elle n’est que le miroir, faussement flatteur, d’une société qui prétend avancer droit… sur un code parfois sévèrement spaghetti.



