La médecine vétérinaire s’apprête-t-elle à révolutionner le traitement des animaux de compagnie grâce aux cellules souches ? C’est la promesse qui agite la communauté scientifique depuis que la start-up Gallant de San Diego vient de lever 18 millions de dollars pour mettre sur le marché la toute première thérapie cellulaire prête à l’emploi et approuvée par la FDA. Mais une question plane : la technologie est-elle vraiment à la hauteur des attentes, ou n’est-ce qu’une énième vague d’espoir biotech ?
Si les cellules souches sont explorées depuis longtemps chez l’humain, leur utilisation pour nos compagnons à quatre pattes reste expérimentale. Gallant cible d’abord la gingivostomatite chronique féline, une pathologie buccale douloureuse chez le chat. Est-ce un choix stratégique motivé par la prévalence de la maladie ou par le besoin de succès rapide sur un terrain peu couvert ? D’ici 2026, si la FDA donne son aval, les vétérinaires pourraient disposer d’un nouvel outil, mais à quel prix pour les patients félins et leurs propriétaires ?
Les premiers travaux semblent prometteurs—en tout cas chez le chien. Des études indiquent que des animaux souffrant d’arthrose ont vu leur douleur et leur mobilité s’améliorer, parfois pendant plusieurs années, avec cette approche. Mais alors, pourquoi les résultats sur l’insuffisance rénale féline, un autre cheval de bataille de Gallant, sont-ils si mitigés ? Ne faudrait-il pas davantage de preuves cliniques avant de crier à la révolution ?
En médecine vétérinaire, la frontière entre espoir scientifique et réalité clinique est plus floue que jamais.
L’innovation de Gallant ? Miser sur la simplicité d’utilisation. Contrairement aux traitements classiques qui obligent à prélever des cellules sur l’animal malade ou un donneur compatible, cette technologie repose sur des cellules prêtes à l’emploi venant d’animaux donneurs, voire d’espèces différentes. Une prouesse technique… mais qu’en est-il des risques immunologiques ou éthiques associés à ce procédé ? Peut-on garantir son innocuité et sa reproductibilité à grande échelle ?
Investisseurs et fonds spécialisés ne semblent pas douter : Digitalis Ventures et NovaQuest Capital Management parient gros sur Gallant. Leur enthousiasme s’explique-t-il par une vision long terme du marché vétérinaire, ou par l’appétit féroce pour les innovations disruptives, quitte à prendre des risques sur la solidité scientifique des dossiers ? S’agit-il d’un pari rationnel fondé sur des preuves tangibles, ou d’un coup de poker dans la santé animale ?
L’histoire de la startup elle-même donne matière à réflexion. Fondée par Aaron Hirschhorn, entrepreneur déjà à l’origine de DogVacay, Gallant a survécu au décès de ce dernier et est désormais dirigée par Linda Black, une scientifique chevronnée. Avec 44 millions de dollars cumulés auprès des investisseurs, la structuration financière de Gallant reflète-t-elle une solidité à toute épreuve ou une fuite en avant dopée par la spéculation ?
À l’heure où la technologie pourrait bouleverser la pratique vétérinaire, reste une question : jusqu’où la science doit-elle aller pour soulager la souffrance animale, et à quel moment la prudence doit-elle l’emporter sur l’enthousiasme des marchés et des start-up ?
Source : Techcrunch