Voilà une semaine typique sur la planète Tech, où l’innovation fait office de pleine lune : tout le monde scrute le ciel mais personne ne sait vraiment ce qui plane au-dessus de nos têtes – ni qui en tire les fils, ou plutôt les ondes. D’un côté, la diva nocturne fait la timide et rappelle, à chaque phase, à quel point l’observation et le spectacle débutent hors de portée, à l’image de ces plateformes qui orchestrent nos vies derrière le voile algorithmique. La Lune disparaît mais continue de rythmer les marées, tout comme Netflix disparait dans l’anonymat des flux de données, mais régit, en coulisse, nos soirs et nos désirs d’évasion.
Car pendant que les astres font leur cinéma, la vraie star sur Terre s’appelle recommandation personnalisée. On pense binge-watcher pour tuer le temps, on découvre qu’en réalité on nourrit un monstre à coup d’heures de visionnage, priant l’algorithme de bien vouloir nous surprendre. Chacun croit tenir la télécommande, mais c’est Netflix qui zappe, ajuste, et affine son modèle de rentabilité – un peu comme Electronic Arts qui, lassée d’innover, a troqué la passion créative pour la gestion optimisée de franchises. Là où la Lune change de robe tous les soirs, l’industrie du jeu vidéo préfère l’uniforme des titres « services », recyclant l’ancien plutôt que d’explorer de nouveaux univers.
Et quand la créativité peine, l’innovation se faufile là où on ne l’attend plus : PayPal et Google marient intelligence artificielle et commerce dans une chorégraphie qui promet de démoder rapidement l’achat compulsif impulsif – l’offre précède la demande, et même les agents IA participeront désormais au panier. La mondialisation n’a même plus besoin de mots ; YouTube double vos vidéos à la volée (merci, IA !), réalise le rêve fou de Babel version YouTube multilingue, et chaque like prétend annuler les frontières linguistiques – sauf que la vraie barrière reste celle de l’attention, monétisable à souhait.
La technologie contemporaine, tour à tour muse, miroir et bourreau, façonne une humanité dispersée entre contemplation, captation et capitulation.
Car si les plateformes traduisent, bannissent ou identifient nos envies à l’avance, c’est bien pour occuper tout le ciel de nos habitudes. Les révolutions silencieuses ne manquent pas : l’extinction du feu par les infrasons promet que même le vacarme de la nature deviendra soluble dans la startup nation, tandis que DJI découvre (à ses dépens) que l’innovation technologique devient instantanément arme ou arsenal selon la latitude – la frontière entre outil et menace n’a jamais été aussi poreuse. On range le drone sous l’étiquette militaire, comme d’autres cachent l’intelligence de l’IA sous le costume du service client.
L’innovation, d’astre ou de désastre, n’a jamais été aussi fluide, oscillant entre fascination, ubiquité et suspicion. À l’heure où chaque algorithme façonne ses cycles, ses phases, ses éteintes par le son ou ses allumages au clic, la seule constante semble être cette lunaire incertitude : qui éclaire quoi, qui contrôle qui ? Et si la technologie poussait, au fond, à faire le deuil du contrôle pour mieux contempler toutes ces lunes, plafonds de verre ou nuages de données, dans le grand théâtre du numérique ?




