« En Silicon Valley, les retournements de veste sont parfois plus fréquents que les mises à jour Windows. » Qui aurait cru qu’un simple désaccord politique jetterait un froid de l’Arctique entre deux titans de la tech ? Ron Conway, le parrain des investisseurs de la côte ouest, vient subitement de claquer la porte du Salesforce Foundation Board. Rien à voir avec une allergie à l’open space ni au bubble tea : c’est bien l’amitié de longue date avec Marc Benioff, patron flamboyant de Salesforce, qui vient de prendre une belle ride, façon écran CRT en fin de vie.
Le feuilleton a commencé lorsque Benioff, tel un cow-boy 2.0 en mal d’action, a réclamé un « show of force » à San Francisco, appelant ni plus ni moins qu’à déployer la Garde nationale pour ramener l’ordre dans les rues – sur fond de soutien affiché à Donald Trump. Un coup de com’ qui a sans doute fait sursauter les communicants de Salesforce, à défaut de calmer les débats sur X (ex-Twitter, mais la saga continue).
Petit détail qui pique : Ron Conway, connu pour miser sur Airbnb avant que les matelas gonflables ne fassent fureur, siège depuis dix ans à la fondation philanthropique de Salesforce. Une institution qui a distribué pas moins de 36 millions de dollars l’an dernier pour aider les jeunes défavorisés, tout en trônant sur un joli pactole de 400 millions. Mais après 25 ans d’alignement politique avec son ami Benioff, le « pivot » du CEO – digne d’une levée de fonds qui tourne vinaigre – a été celui de trop pour Conway. Comme quoi, la tech n’est pas la seule à aimer les disruptions.
Même les amitiés les plus anciennes peuvent booter sur l’écran bleu du désaccord politique.
Dans un email digne d’un soap opéra, Conway écrit à Benioff : « Il me peine infiniment de dire qu’avec tes récentes prises de position et ton incapacité à en percevoir l’impact, je ne reconnais plus celui que j’ai tant admiré ». Un message qui ne manque ni de piquant, ni de nostalgie. Si on voulait être cynique, on parlerait presque d’un « uncanny valley » de l’amitié en mode business.
Salesforce, qui aimerait sûrement parler cloud plutôt que climat politique, remercie poliment Conway pour « son incroyable contribution » à la fondation. Mais pas de bidouillage de communiqué : la rupture est consommée. Ce clash survient pile lors de la Dreamforce, la grand-messe tech rassemblant tous les nerds branchés de SF autour du Graal du CRM. On a connu timing plus discret.
Ce drama à la sauce siliconée n’est pas isolé : après avoir presque tous juré fidélité à la cause démocrate, voilà que les stars de la tech – Benioff, mais aussi Andreessen Horowitz et compagnie – s’affichent avec les couleurs de Trump comme on troque un t-shirt Apple contre du Google lors d’un hackathon. Changement d’époque ou simple caprice de milliardaires en manque de rebondissements ? Suspense…
Reste à savoir si ce divorce de haute voltige inspirera d’autres « exit strategies » chez les professionnels de la disruption. Une chose est sûre : dans la Silicon Valley, on a beau prôner l’agilité, certaines fractures sont impossibles à patcher… Sauf miracle via une prochaine mise à jour de l’amitié. Et en attendant, on rappellera que dans l’industrie du logiciel comme des relations humaines, il vaut mieux sauvegarder souvent !
Source : Techcrunch




