Roblox est-il véritablement en train de renforcer la sécurité de ses adolescents utilisateurs, ou n’est-ce qu’une réponse précipitée aux critiques et pressions politiques ? Alors que la plateforme de jeu populaire annonce de nouvelles mesures de protection pour les 13-18 ans, on ne peut s’empêcher de se demander si ces annonces suffiront à apaiser les inquiétudes croissantes concernant la sécurité des mineurs en ligne.
En avril, Roblox s’est retrouvé dans la ligne de mire après qu’un procureur général de Floride a dénoncé l’exposition supposée d’enfants à des contenus inappropriés et à des adultes prédateurs sur la plateforme. Face à ce tollé, la firme dévoile à présent “Trusted Connections”, un système qui permettrait aux adolescents de dialoguer plus librement avec les personnes qu’ils connaissent vraiment, moyennant une confirmation de l’âge via une technologie de reconnaissance faciale. Mais la multiplication des polémiques, notamment autour de la messagerie prédatrice, a-t-elle vraiment poussé Roblox à revoir en profondeur ses priorités ?
La société ne s’arrête pas là : elle rebaptise le statut “Amis” en “Connections”, et introduit des outils de contrôle parental inédits. Par exemple, les parents pourront désormais voir avec qui leur adolescent discute, combien de temps il passe sur la plateforme, ou encore recevoir une notification lors de certains achats. Selon Roblox, ces évolutions devraient réduire l’incitation des jeunes à migrer leurs échanges vers d’autres applications potentiellement plus dangereuses. Mais dans quelle mesure ces contrôles sont-ils efficaces et adaptés à l’ampleur de la menace ?
La question persiste : ces nouvelles protections ne risquent-elles pas simplement de déplacer le problème au lieu de l’éradiquer ?
L’accès à “Trusted Connections” nécessite une estimation automatique de l’âge par selfie vidéo, ou bien la vérification par pièce d’identité si la première méthode échoue. Les discussions privées entre adolescents vérifiés seront ainsi très encadrées – et surveillées en cas de risque critique, comme le grooming. Quant aux adultes, il leur faudra désormais authentifier une relation réelle via QR code pour converser sans filtre avec un mineur. Mais ces barrières virtuelles ne sont-elles pas périmées à l’heure où les adolescents jonglent avec mille astuces pour contourner les restrictions numériques ?
Du côté de la vie privée, Roblox offre plus de contrôle aux adolescents, qui pourront choisir qui voit leur présence en ligne et limiter les notifications reçues pendant certaines plages horaires. Une souplesse bienvenue, qui cache néanmoins une collecte de données toujours plus sophistiquée en arrière-plan. Peut-on dès lors réellement parler d’autonomie digitale quand chaque clic, chaque connexion devient traçable par les parents ?
Les familles auront désormais accès à un tableau de bord détaillé, censé simplifier la vie des parents débordés. Dina Lamdany, directrice produit chez Roblox, affirme que l’objectif est de donner “un aperçu rapide” de l’activité des adolescents, pour une surveillance discrète et non-intrusive. Mais ce modèle de co-surveillance n’est-il pas en train de façonner une génération de jeunes toujours plus surveillée, au détriment de leur autonomie et de leur confiance numérique ?
En fin de compte, alors que Roblox tente tant bien que mal de concilier sécurité et liberté numérique pour ses jeunes utilisateurs, une question demeure : ces outils de vérification et de contrôle parental suffiront-ils à réellement protéger les adolescents — ou ne font-ils qu’ajouter une illusion de sécurité, là où la vigilance humaine devrait primer ?
Source : Techcrunch
