« Rien ne sert de courir, il faut investir à point. » Oui, on sait, La Fontaine n’avait pas prévu le capital-risque et les levées de fonds faramineuses, mais ça aurait pu lui plaire ! Parce que la start-up Nothing, qui ose défier les géants du smartphone, vient de lever la modique somme de 200 millions de dollars lors de son tour de table série C. À ce tarif-là, on commence à payer très cher pour… du « rien » ! (Avouez, le jeu de mots était tentant.)
Dirigée par le serial entrepreneur Carl Pei (ex-OnePlus), Nothing ne fait pas « rien », justement. Grâce à des soutiens costauds comme Tiger Global, GV ou encore Qualcomm Ventures, la société voit sa valorisation exploser à 1,3 milliard de dollars. Et autant vous dire que pour une start-up dont la principale innovation est le design transparent, ils ont tout fait… sauf rester invisibles sur le radar des investisseurs.
Mais alors, ce Nothing, c’est vraiment tout ou rien ? La société ne pèse encore que quelques miettes de parts de marché, à peine 1% sur l’ensemble du globe et 2% en Inde – là où les téléphones se comptent littéralement à la pelle. Pourtant, plus d’un million d’appareils ont trouvé preneur rien qu’en un trimestre (Q2 2025), preuve que l’élégance minimaliste alliée à une pincée d’IA séduit un public de geeks créatifs, lassés des mastodontes du secteur.
En matière de smartphones, ce n’est pas toujours celui qui fait le plus de bruit qui décroche la plus belle sonnerie de caisse.
Pour Carl Pei, justement, il est temps de s’adresser à une nouvelle génération d’utilisateurs : jeunes, plasticiens du selfie, fans de techno et d’originalité. L’objectif ? Leur offrir non pas un objet supplémentaire, mais une vraie expérience augmentée, mâtinée d’intelligence artificielle. Nothing prépare son prochain round de financement communautaire et promet à ses fans encore plus de transparence. Avec eux, le crowdfunding n’a (presque) rien à cacher.
Si la différence de Nothing s’est longtemps jouée sur le look (un soupçon rétro, beaucoup de LED et une coque transparente qui clignote), la vraie révolution est à venir : un système d’exploitation dopé à l’IA qui pourra dépasser le seul smartphone. Essential Search, par exemple, cherche à faire de votre portable votre assistant surdoué qui retrouve tout à votre place, sauf vos chaussettes sales. S’ils veulent transformer l’essai, l’enjeu sera de convaincre les utilisateurs que l’IA se contrôle en toute confiance, sans se transformer en Sam Siri le robot gaffeur.
Mais prenons du recul : vouloir détrôner Apple et Samsung avec du hardware-smartphone centré sur l’IA, c’est comme prétendre révolutionner la baguette avec du pain sans gluten. Les tentatives récentes (coucou Rabbit, hello Humane) se sont soldées par des rachats ou des bugs plus célèbres que leurs fonctionnalités. Tout le défi pour Nothing sera donc d’éviter l’effet soufflé qui retombe, même boosté à l’intelligence artificielle.
En attendant de voir si la mayonnaise prend – et que le « rien » devienne tout – il y a quelque chose d’indéniable : dans l’univers du smartphone saturé, misons sur ceux qui osent le transparent… et les gros chèques. Après tout, avec 200 millions en poche, il n’est jamais trop tard pour se payer un peu de visibilité. Tiens, on dirait bien que dans le monde de Nothing, le « rien » rapporte parfois… gros !
Source : Techcrunch
