« Noirs et serrés, ils tournent en rond… » Voilà un refrain que les astronomes risquent de fredonner après leur dernière prouesse cosmique ! Car oui, pour la première fois de notre histoire, nous avons eu droit à un cliché radio d’un duo de trous noirs dans une valse gravitationnelle endiablée. Difficile de faire plus romantique que deux monstres de l’espace qui tournent l’un autour de l’autre depuis, oh, quelques milliards d’années…
Il s’agissait d’un vieux secret de l’univers : on soupçonnait l’existence de ces couples de trous noirs supermassifs, mais, jusqu’ici, tout relevait des rumeurs et des équations griffonnées sur des tableaux plus noirs que leur sujet. Cette fois, c’est officiel — le couple de l’année loge à cœur de quasar OJ 287, à 3,5 milliards d’années-lumière de notre humble Planète Bleue. Pour la scène, imaginez deux ogres galactiques qui se tournent autour, semant des éclats lumineux tous les 12 ans comme le ferait une vieille ampoule dans une discothèque poussiéreuse!
Mais ne vous y trompez pas : ces deux trous noirs ne sont pas du genre à se cacher derrière un rideau de discrétion. Grâce à un jeu coopératif entre radio télescopes terrestres et le satellite RadioAstron, les scientifiques viennent de capturer une image à couper le souffle — ou plutôt à aspirer la matière environnante. Chacun des trous noirs apparemment émet ses propres jets d’énergie ! Une séance photo interstellaire où tout le monde a sorti ses plus beaux faisceaux.
Les trous noirs étaient censés avaler la lumière, mais aujourd’hui, ils font la une des journaux avec leurs parades lumineuses.
Petite anecdote cosmique : il y a 50 ans, la plupart des experts doutaient carrément que les trous noirs existent. Aujourd’hui, ils font carrière de stars, photographiés par des réseaux synchronisés de radiotélescopes à travers la planète (et maintenant au-delà !). Loin d’être de simples « tâches noires », ils sont devenus des vedettes de la science avec, à leur actif, leur premier selfie en 2019 avec la galaxie Messier 87… et à présent, un cliché de couple en orbite ! Comme quoi, dans l’espace, même la discrétion finit par travailler la pose.
Revenons à nos deux galactiques tourtereaux. OJ 287 n’a pas toujours été sous le feu des projecteurs. Dès la fin du XIXe siècle, certains astronomes zoomeurs avant l’heure avaient noté quelque chose de bizarre : une fluctuation lumineuse très régulière. C’est seulement dans les années 80 qu’un Finlandais génial, Aimo Sillanpää, a émis l’idée d’un duo gravitationnel. Depuis, à coups de calculs et de patience, la communauté n’attendait plus qu’un cliché pour en faire la une… pari réussi grâce à un peu de technologie spatiale et beaucoup d’observation patiente !
Mais personne n’aurait pu y arriver sans la super équipe de RadioAstron. Ce satellite russe, qui orbitait à 200 000 km d’ici (presque à mi-chemin de la Lune !), a permis une résolution « cosmico-hypermégagiga » (oui, c’est un terme technique*) suffisante pour distinguer non pas un, mais bien deux centres goulus. Les méthodes diffèrent de celles du fameux Event Horizon Telescope — lui qui préfère garder les pieds sur Terre, littéralement, pour relier des antennes sur toute la planète.
D’ailleurs, chaque méthode a ses avantages et ses travers : la technique spatiale voit loin, mais moins net à cause des ondes longues; le EHT voit moins loin, mais plus fi-deli-té. Dans le cas d’OJ 287, sans l’observation spatiale, le binôme serait resté fondu dans un seul point lumineux. C’est ainsi qu’on a pu découvrir, cerise sur le gâteau, que le plus petit des deux trous noirs produit même un jet spiralé qui se tortille avec enthousiasme autour de son grand compère ! De quoi inspirer les plus beaux scénarios de science-fiction.
Alors, la morale de cette histoire sidérale ? L’univers a toujours plus d’un trou noir dans son sac, et il arrive que même les régions les plus obscures se prennent au jeu de la lumière… Pour observer le cosmos, il faut garder l’œil ouvert — et parfois, le RadioAstron.
Source : Mashable




