Les entretiens d’embauche seront-ils bientôt menés par une intelligence artificielle, et non plus par des humains ? Cette question, qui pouvait sembler saugrenue il y a encore quelques années, pointe désormais dans le quotidien des chercheurs d’emploi de tous horizons. Faut-il se réjouir ou s’inquiéter de voir débarquer des robots recruteurs dans le processus de recrutement ? S’agit-il d’une avancée pour les candidats ou simplement d’un nouveau filtre opaque ?
La startup Alex, encore méconnue mais soutenue par plusieurs acteurs influents de la tech et de la finance (dont Y Combinator et d’anciens DRH de groupes Fortune 500), affirme révolutionner la sélection initiale des candidatures grâce à un agent conversationnel vocal d’un genre nouveau. Son ambition est claire : remplacer l’humain pour les premiers entretiens, automatiser la vérification des antécédents, des prétentions salariales et de la disponibilité. Est-ce la fin des longues attentes pour décrocher un simple screening call ?
Mais peut-on vraiment faire confiance à l’IA pour cerner la personnalité et le potentiel d’un candidat ? Alex revendique déjà des milliers d’entretiens par jour pour le compte de grandes sociétés, sans toutefois préciser lesquelles. Et la jeune pousse n’est pas seule : des concurrents comme HeyMilo, ConverzAI ou Ribbon convoitent le même marché. Pourquoi un tel engouement des investisseurs ? Peut-être parce que le marché du recrutement pèse des milliards, ou parce qu’il s’agit d’un secteur prêt à être disrupté ?
L’IA promet d’accélérer le tri des candidatures, mais soulève de nouvelles interrogations sur la transparence et l’équité du recrutement.
Pour ses promoteurs, Alex sera capable à terme de constituer une base de données sur les professionnels plus « riche et profonde » que LinkedIn lui-même. Son fondateur, Aaron Wang, assure qu’un entretien de dix minutes avec son IA est bien plus révélateur qu’un profil en ligne. Faut-il donc s’attendre à une standardisation du recrutement basée sur la conversation AI ? Ou risquons-nous de perdre, en route, la subtilité des rencontres humaines et l’intuition des recruteurs ? D’ailleurs, comment garantir que les biais humains ne soient pas, au contraire, répliqués par ces algorithmes ?
Si les bénéfices en termes d’efficacité sont clairs pour les entreprises, il est permis de s’interroger sur les conséquences pour les candidats, surtout les plus fragiles ou ceux dont le parcours ne rentre pas dans les cases prédéfinies. Verrons-nous émerger un nouveau marché parallèle, celui de la préparation à l’entretien face à une IA ? Et que penser des positions de force que prendront les entreprises capables de capter des données inédites sur des millions d’individus ?
Au final, l’automatisation des entretiens de recrutement marque un tournant radical. Simple gadget ou révolution silencieuse aux ramifications encore insoupçonnées ? L’enjeu n’est plus seulement de gagner du temps, mais de repenser toute la relation entre candidat et employeur à l’ère de l’intelligence artificielle. L’enthousiasme des investisseurs, qui viennent d’accorder 17 millions de dollars à Alex, masque-t-il une transformation profonde et inévitable du rapport au travail ?
Dès lors, une question demeure : sommes-nous prêts à laisser une IA décider de l’avenir professionnel de millions de personnes ?
Source : Techcrunch




