Si les maîtres du monde étaient des enfants de cour de récré, leurs chamailleries s’afficheraient en stories. Mais en 2025, Elon Musk et Sam Altman préfèrent griller leur voltmètre d’ego à travers posts électrisants sur X. D’un côté, le grand prêtre du lancement raté – pardon, du Roadster Tesla lent comme la réforme du brevet informatique – de l’autre, l’oracle IA ayant troqué l’éthique contre le dollar. Et pendant qu’ils se disputent le titre de plus grand gourou ou faiseur de miracles (ratés, mais ça compte), notre avenir technologique se décide entre punchlines et remboursements Paypal.
Ce feuilleton soigneusement orchestré, à mi-chemin entre Les Feux de l’Amour et Planète des Singes version algorithmique, illustre surtout une chose : la technologie court si vite qu’elle finit en tongs devant le tapis roulant de la réalité. Ailleurs, pendant que Musk jette OpenAI sous les roues du progrès à retardement, Apple se retrouve dans une bien charmante position… celle du prof d’informatique qui copie discrètement sur son élève surdoué. Parce que, oui, la firme à la pomme vient carrément d’avaler son orgueil pour intégrer le super cortex Gemini de Google dans Siri, histoire que l’assistant retrouve ses mots (autrement qu’en récitant la météo en boucle).
Il y a là une ironie délicieuse : alors que Musk accuse Altman d’avoir privatisé “leur” intelligence collective, la plus sectaire des communautés tech, Apple, signe sans trembler un milliard de dollars pour louer l’intelligence du voisin tout en préparant, en coulisse, son propre Frankenstein maison. Où est passée la frontière entre l’orgueil de l’inventeur solitaire et l’aveu, quasi public, de l’interdépendance chronique entre tous ces géants ? Derrière les clashs de plateaux et les embrouilles d’assistants vocaux, on découvre la nouvelle vérité de la Silicon Valley : il n’y a plus de génie isolé, seulement des alliances en perfusion et des egos branchés sur secteur.
La technologie fait plus d’étincelles quand elle frotte les egos plutôt que les moteurs.
On pourrait y voir un soupçon de sagesse : même la pomme la plus brillante finit dans la corbeille à fruits technologique si elle refuse d’évoluer à l’ombre d’un autre arbre généalogique. Apple, le bastion du “do it yourself”, se fait tout à coup le chantre de la collab’ post-moderne, alors que Musk, prêt à ressasser ses griefs jusqu’à la fusion solaire, incarne le refus d’enterrer la hache de guerre version open source (tant que les profits restent privatisés). Mais tous, à leur façon, mendient une dopamine de reconnaissance sur X ou sur le marché mondial. Et si le vrai moteur de la tech, désormais, ce n’était plus l’innovation, mais la quête d’ego interconnectés ?
La guerre des Watts, l’emprunt de cerveaux et les carambolages de milliardaires prouvent que dans la jungle high-tech, la verticalité ne mène qu’à l’impasse. Ce sont les interfaces, les câbles mal branchés et les règlements de comptes publics qui font – et feront encore – avancer l’histoire. Tant mieux : au moins, pendant qu’ils butinent chacun dans le jardin de l’autre, on a de quoi rire entre deux bugs. Vivement le prochain crossover : Siri qui trolle Altman en lui livrant une Tesla Roadster via colissimo… pas avant 2032.



