Le débat autour de TikTok aux États-Unis va-t-il s’achever un jour ? Le feuilleton continue, et la question mérite d’être posée alors que le président Donald Trump semble osciller entre fermeté et indulgence envers l’application favorite des jeunes Américains. Pourquoi la Maison Blanche n’a-t-elle toujours pas tranché en faveur d’un bannissement définitif ou d’une solution pérenne ? Derrière chaque prolongation, un épineux jeu d’équilibre s’installe entre la sécurité nationale, les relations commerciales sino-américaines et les intérêts politiques du moment.
Après avoir déjà différé à deux reprises le gel de TikTok, Donald Trump annonce être prêt à accorder une nouvelle rallonge si la vente de la branche américaine de l’application à une entité locale ne se conclut pas avant la date du 19 juin. Est-ce la crainte d’un tollé populaire ou le signe d’un rapport ambigu avec l’application ? Selon ses propres mots lors d’une interview sur NBC, Trump dit nourrir une certaine « chaleur » pour TikTok. Mais peut-on vraiment croire que la bienveillance présidentielle prime sur d’autres considérations géopolitiques ou économiques ?
Rappelons qu’il y a quelques mois à peine, le Congrès exigeait la cession de TikTok par ByteDance, sous peine d’interdiction pure et simple sur le territoire américain. La mesure a d’ailleurs provoqué une disparition temporaire de l’application en janvier. Pourquoi une telle volatilité dans la prise de décision ? L’urgence sécuritaire avancée justifie-t-elle ces multiples reports, ou sommes-nous témoins d’un bras de fer tenté sans conviction avec Pékin ?
La guerre de TikTok révèle bien plus qu’un simple conflit autour d’une application : c’est un miroir de la rivalité technologique et politique entre les États-Unis et la Chine.
En réalité, ces délais répétés semblent orchestrer plus qu’un simple marchandage technologique : ils mettent en lumière l’imbrication étroite entre enjeux économiques et stratégiques. Ainsi, le président a ouvertement mentionné lors du dernier report de 75 jours que le gouvernement chinois n’était guère enthousiaste face aux nouveaux tarifs douaniers imposés par les États-Unis. Doit-on comprendre que TikTok serait devenu un pion, sinon une carte maîtresse, dans les négociations commerciales bilatérales ? Ou Trump se sert-il du dossier TikTok pour gagner du temps, en attendant un contexte politique plus favorable à une décision tranchée ?
Loin d’apporter une réponse définitive, Trump sème à chaque intervention de nouvelles interrogations sur la capacité réelle du gouvernement américain à imposer ses vues à une puissance étrangère, dans un domaine aussi sensible que le numérique. Faut-il continuer à croire que la vente de TikTok à des investisseurs américains pourrait véritablement résoudre la question du contrôle des données et rassurer les membres du Congrès ?
Au-delà du sort de TikTok, l’affaire interroge sur la souveraineté numérique des États-Unis, et sur la manière dont les dirigeants utilisent les outils législatifs comme leviers de pouvoir face à la montée en puissance de la Chine. Cette posture hésitante aura-t-elle un impact durable sur la confiance des citoyens en leurs institutions et leur capacité à protéger la vie privée et la sécurité nationale ?
En choisissant de prolonger encore le suspense, le président Trump ne prend-il pas surtout le risque de nourrir frustrations et méfiances, au sein d’une population et d’un secteur technologique déjà échaudés par plusieurs années de tensions et de revirements politiques ?
Source : Techcrunch
