Le monopole de Google sur les moteurs de recherche est-il en train de vaciller sous la pression judiciaire américaine, ou assistons-nous à une nouvelle bataille juridique sans véritable changement pour les utilisateurs ?
Le procès antitrust qui oppose le géant de la tech au gouvernement américain vient de franchir une étape décisive avec la clôture des plaidoiries. Pourtant, Google a déjà annoncé, via un post sur X, qu’il refuse de baisser les bras et prévoit de faire appel sans attendre. Pourquoi une telle précipitation ? Le groupe estime que les solutions proposées sont excessives et pourraient, selon lui, « nuire aux consommateurs ». Mais sur quels fondements Google avance-t-il que l’issue du procès compromettrait les intérêts du public ?
Derrière la simple question du monopole se cachent des enjeux bien plus vastes. Faut-il croire, comme le défend Google, que s’attaquer à sa position dominante sur la recherche expose les citoyens à des risques accrus en matière de vie privée et de contrôle des données ? Ou est-ce là une stratégie pour garder la main et contenir la concurrence (à commencer par Apple et Samsung, partenaires historiques dont les accords de pré-installation sont visés par les solutions du DOJ) ? Où est la frontière entre défense de l’utilisateur et protection de sa propre position ?
La question cruciale reste de savoir si une victoire du DOJ rebattrait vraiment les cartes de la concurrence ou ouvrirait la voie à de nouveaux géants du numérique.
Il est intéressant de noter que Google a proposé une série de concessions alternatives : desserrer ses accords avec les fabricants pour offrir plus de choix en termes de moteurs de recherche, et placer ses pratiques sous la surveillance d’un comité indépendant. Ces gestes sont-ils sincères ou simples tactiques d’apaisement ? Le juge Amit Mehta, lui, n’a pas été convaincu. En août 2024, il a estimé que l’entreprise détenait bel et bien un monopole illégal, en particulier du fait de la synergie entre Chrome et le moteur de recherche qui assure à Google un flux d’utilisateurs quasi inépuisable et des revenus substantiels. Le DOJ ira-t-il jusqu’à exiger la vente de Chrome ou l’ouverture de certaines technologies clés ?
Mais cet affrontement ne concerne-t-il que le présent ? L’enjeu dépasse en réalité les moteurs de recherche classiques. Car dominer la recherche aujourd’hui, c’est aussi s’assurer des positions privilégiées dans le développement de l’IA et des assistants conversationnels de demain. Des géants comme OpenAI guettent déjà l’opportunité : un cadre de la firme a affirmé, lors du procès, qu’OpenAI serait intéressée par l’acquisition du navigateur Chrome si Google venait à devoir s’en séparer. Après Google, d’autres titans de l’IA pourraient-ils devenir les nouveaux arbitres de nos recherches sur le web ?
En définitive, la justice américaine est face à un choix de société : faut-il démanteler un empire pour permettre l’éclosion de nouveaux acteurs, au risque de voir la concentration du pouvoir se reproduire ailleurs ? Les consommateurs y gagneront-ils une offre plus diversifiée et des garanties pour leur vie privée, ou s’agit-il d’un jeu de chaises musicales entre géants technologiques ?
A qui profitera vraiment l’issue de cette confrontation entre colosses du numérique et autorités judiciaires : aux citoyens ordinaires, ou à des puissances montantes prêtes à prendre le relais ?
Source : Engadget