Robinhood cherche-t-il vraiment à démocratiser l’investissement tech, ou joue-t-il avec la frontière de l’éthique financière ? C’est la question que l’on se pose alors que la plateforme d’investissement a récemment mis en vente des « OpenAI tokens », prétendant offrir aux investisseurs européens un accès inédit à l’un des géants de l’intelligence artificielle. Mais que se cache-t-il derrière cette initiative, et les particuliers sont-ils vraiment gagnants ?
La première réaction ne s’est pas faite attendre. OpenAI, la star montante de la Silicon Valley, a rapidement pris ses distances via un post sur X, excluant toute collaboration avec Robinhood et dénonçant ces tokens : « Nous n’avons ni autorisé, ni endossé cette offre, qui ne possède aucune valeur d’action dans notre société. » Dès lors, peut-on vraiment faire confiance à ces nouveaux produits qui surgissent sur le marché sans le consentement des entreprises concernées ?
Robinhood, pour sa défense, met en avant le rôle d’un « special purpose vehicle » (SPV) : une structure qui, théoriquement, détient des actions privées d’OpenAI, offrant ainsi la possibilité aux particuliers d’acheter un « accès indirect » à ce trésor. Mais cela ne revient-il pas à vendre une promesse d’investissement plus qu’un véritable produit financier ?
La multiplication des véhicules financiers innovants laisse planer le doute sur le véritable bénéficiaire de ces nouvelles offres : l’investisseur ordinaire ou les plateformes elles-mêmes ?
Vlad Tenev, le PDG de Robinhood, assume la nuance : « Les tokens ne sont pas réellement de l’équité, mais ils permettent un accès à ces actifs privés, constituant, selon lui, la “révolution de la tokenisation”. » Doit-on prendre au sérieux cette transformation du marché, ou s’agit-il surtout d’une opération marketing pour attirer des investisseurs à la recherche de sensations fortes ?
Pourtant, la pratique du SPV n’est pas nouvelle, notamment dans la sphère des startups où elle permet souvent d’attirer des capitaux en contournant les barrières imposées aux petits investisseurs. Mais selon TechCrunch, ces SPV sont parfois surévalués par rapport à la valeur réelle des actions privées qu’ils représentent. Robinhood ouvre-t-il ainsi une brèche vers un marché plus accessible, ou expose-t-il ses utilisateurs à un risque sous-estimé ?
L’autre point aveugle de cette opération demeure la valorisation vertigineuse d’OpenAI : 125 milliards de dollars annoncés, sans que la société n’ait encore prouvé la solidité de ses revenus à long terme. Peut-on raisonnablement acheter un accès à un géant dont le modèle économique n’a pas encore fait ses preuves ? L’histoire de la tech regorge d’exemples où l’emballement des valorisations s’est soldé par de cruelles déconvenues pour les petits investisseurs.
Face à la multiplication de ces produits nébuleux et à l’absence de garde-fous clairs, il est temps de s’interroger : l’innovation dans la finance profite-t-elle réellement au plus grand nombre, ou est-elle en train de façonner une nouvelle bulle où seuls quelques-uns tireront vraiment leur épingle du jeu ?
Source : Engadget