Jusqu’où peut aller l’intelligence artificielle dans nos outils d’écriture du quotidien ? Depuis le rachat du startup Coda, Grammarly ne cesse d’afficher ses ambitions : transformer la rédaction professionnelle et académique grâce à une interface radicalement revisitée… mais au risque de substituer l’humain à la machine ?
On découvre un tout nouveau Grammarly, qui s’affiche désormais avec une interface dite « block-first ». Pourquoi ce choix ? Ce système, inspiré des plateformes collaboratives, permet aux utilisateurs d’insérer des tableaux, listes, colonnes ou alertes, allant bien au-delà de la simple correction grammaticale. Est-ce le signe que Grammarly ne veut plus être perçu comme un simple assistant, mais comme un environnement de travail complet ?
Mais ce n’est pas tout. La grande nouveauté vient surtout des multiples agents IA greffés à la plateforme. Un correcteur automatique, un détecteur de plagiat et même un « AI grader », capable de relire vos textes comme un professeur virtuel. Qui sera le vrai juge, alors : l’enseignant de chair et d’os ou l’algorithme ? Même le style et le ton de votre prose peuvent désormais être adaptés d’un clic, tandis qu’un « Citation Finder » va traquer les sources pour générer les références à votre place. Peut-on parler d’un tournant pour la créativité dans l’écriture ?
Grammarly s’impose comme une plateforme qui veut à la fois enseigner, assister et surveiller l’acte d’écrire.
La contradiction s’affiche pourtant au grand jour. Du côté des étudiants, certains y voient une béquille bienvenue, d’autres s’inquiètent de la détection toujours plus pointue de contenus générés… par IA. Luke Behnke, VP chez Grammarly, l’admet : les détecteurs d’IA restent imparfaits, même si l’entreprise affirme offrir le « niveau de précision le plus élevé du marché ». Mais cette promesse rassure-t-elle face à un outil qui scrute et juge un texte avant qu’il ne soit remis à un professeur, brouillant sans cesse la frontière entre accompagnement pédagogique et contrôle ?
Parallèlement, la start-up ne cache plus sa soif de croissance rapide : rachat du client e-mail Superhuman, levée d’un milliard de dollars, ambition d’intégrer toujours plus d’agents IA. Leçons à tirer ? L’équilibre entre soutien à l’innovation et gestion éthique de la technologie semble plus instable que jamais, surtout dans une époque où l’automatisation de la rédaction soulève autant d’enthousiasme que d’inquiétudes. La « moral imperative » de Grammarly est-elle une formule sincère ou un simple slogan marketing ?
Finalement, Grammarly tente de conjuguer deux ambitions à la fois: aider les élèves à exploiter le potentiel de l’IA, tout en les incitant à ne pas franchir la ligne rouge du plagiat assisté. Est-il possible de prétendre former la future main-d’œuvre numérique tout en traquant sans relâche les excès de cette même technologie ?
Au-delà des outils, la vraie question n’est-elle pas de savoir à quoi ressemblera l’acte d’écrire demain : entre liberté créative, surveillance accrue, et assistance généralisée, choisirons-nous notre camp ?
Source : Techcrunch




