La NASA peut-elle réellement ressusciter une mission spatiale déclarée morte, et à quel prix ? La saga du rover VIPER, conçu pour découvrir de l’eau au pôle sud lunaire, fait parler d’elle dans la communauté spatiale et soulève des interrogations sur les coulisses de la conquête lunaire.
L’agence spatiale américaine avait annulé le projet VIPER – un robot déjà bien avancé censé forer la glace lunaire – en juillet 2024. La raison ? Retards de lancement et dérapage des coûts. À ce stade, près de 450 millions de dollars auraient déjà été investis dans l’espoir de déterminer les meilleurs sites d’atterrissage pour de futurs astronautes de l’Artemis. Pourtant, alors que tout le monde croyait le projet démantelé, une volte-face inattendue s’est produite. Pourquoi ce soudain revirement, et surtout quelles tractations l’ont rendu possible ?
Le choix initial d’Astrobotic Technology pour embarquer le rover avait été écarté, la NASA jugeant qu’un supplément de temps de test était nécessaire pour leur atterrisseur commercial. Mais, derrière les annonces officielles, la pression montait en coulisse. Qui a intérêt à voir VIPER sur la lune ?
Derrière la survie miraculeuse du rover VIPER se cache un mélange d’intérêts industriels, de lobbying politique et de compétition internationale pour les ressources lunaires.
C’est finalement Blue Origin, la société de Jeff Bezos, qui vient d’être désignée pour transporter VIPER vers la lune en 2027, dans le cadre du programme Artemis dont l’objectif est d’installer durablement l’homme sur notre satellite. Mais ce choix est-il vraiment technologique, ou politique ? Selon Grant Henriksen, porte-parole de la National Space Society, « La sélection de Blue Origin est une victoire pour la science et l’exploration, mais aussi pour la collaboration public-privé. » Pourtant, n’y a-t-il pas d’autres enjeux cachés derrière ce partenariat renouvelé entre la NASA et une entreprise du secteur privé, à l’heure où la privatisation du spatial bat son plein ?
Le volet scientifique n’est pas mis de côté : Blue Origin devra concevoir, tester et faire atterrir le rover avant que la NASA ne prenne le contrôle du robot pour une centaine de jours d’exploration. Précisons que l’entreprise bénéficiera d’un nouveau contrat de près de 190 millions de dollars… pour une réplique d’atterrisseur déjà en construction. Mais qu’est-ce qui motive une telle persévérance (et de si gros investissements) pour trouver quelques traces de glace lunaire ?
L’eau est devenue l’objet de toutes les convoitises, tant pour la vie humaine que pour fabriquer du carburant ou de l’oxygène – indispensable à l’installation durable sur la lune, puis le saut vers Mars. En toile de fond, la compétition internationale fait rage : la Chine, forte de sa mission Chang’E-5 qui a détecté de l’eau en 2020, ambitionne de planter son drapeau au pôle sud lunaire avant 2030. L’Amérique craint-elle de voir son leadership contesté – voire ses ressources accaparées – par une autre puissance spatiale ?
La renaissance du projet VIPER n’est donc pas qu’une simple victoire de la science, mais aussi le fruit d’un jeu d’influence. Des groupes d’intérêt ont fait pression sur le Congrès pour sauver la mission, invoquant la nécessité de ne pas laisser filer l’avance américaine, comme l’a souligné le nouveau patron par intérim de la NASA : « On adore les défis. On adore la compétition. Et on va gagner. »
En fin de compte, cette aventure interroge : VIPER saura-t-il réellement percer les secrets de la glace lunaire ou assiste-t-on à une illustration de la géopolitique galopante de l’espace ? Une question demeure : jusqu’où sommes-nous prêts à aller, et à payer, pour être les premiers à exploiter les ressources de la Lune ?
Source : Mashable




