Google est-il en train de transformer radicalement notre façon de chercher l’information en ligne, voire de redéfinir l’écosystème du web tout entier ? Depuis plus de deux ans, le moteur de recherche expérimente et étend ses “AI Overviews”, ces résumés générés par intelligence artificielle qui apparaissent désormais en haut de ses pages de résultats. Mais derrière ces innovations, quels enjeux économiques et stratégiques se jouent vraiment ? Et à qui profitent ces changements exponentiels ?
Avec plus de 1,5 milliard d’utilisateurs chaque mois et une présence dans plus de 100 pays, l’expansion des AI Overviews semble implacable. Pourquoi Google accélère-t-il autant le développement de ces outils génératifs, et surtout, à quel prix pour les autres acteurs du web ? Alors que les éditeurs et les médias signalent une baisse considérable de trafic depuis l’arrivée de ces résumés automatisés, la firme de Mountain View préfère mettre en avant le potentiel de revenus et d’engagements suscité par l’IA. Mais cet argument économique masque-t-il une prise de contrôle progressive de la façon dont l’information circule en ligne ?
Il faut dire que le déploiement de la publicité dans ces AI Overviews, amorcé en octobre dernier, ajoute une nouvelle couche à la stratégie de monétisation de Google. De plus, l’introduction du “AI Mode”, permettant aux utilisateurs de poser des questions complexes et enchainées, signale l’ambition du géant à rivaliser directement avec les interfaces conversationnelles d’acteurs émergents comme ChatGPT ou Perplexity. L’omniprésence de l’IA dans la recherche sur Google va-t-elle changer pour toujours la nature même du web et la place des éditeurs ?
La domination de Google sur la recherche en ligne soulève de nouvelles questions sur la diversité de l’information et sur l’équilibre entre innovation et concurrence.
Mais la poussée de l’IA ne s’arrête pas là. L’entreprise met aussi en avant la croissance rigoureuse de ses autres fonctionnalités IA, comme “Circle to Search”, qui permet de sélectionner n’importe quel élément sur l’écran de son smartphone pour demander instantanément des explications ou des informations. Signe de l’engouement provoqué, cette fonctionnalité est désormais installée sur plus de 250 millions d’appareils, avec une augmentation d’utilisation de près de 40% en un trimestre. Dans le même temps, les recherches par images à travers Google Lens, l’autre bijou multimodal de la firme, battent des records depuis octobre dernier avec cinq milliards de requêtes supplémentaires et une hausse significative des achats réalisés via ce canal.
Malgré ce succès affiché et une croissance apparemment irrésistible, Google doit faire face à une vague de contestations. Sur le front judiciaire, le Department of Justice américain multiplie les attaques antitrust, exigeant par exemple que Google se sépare de Chrome ou encore de ses activités adtech, pointant du doigt une situation de monopole jugée illégale par plusieurs tribunaux fédéraux. Cette pression réglementaire pourrait-elle forcer le géant à revoir sa position dominante sur l’écosystème numérique ?
Alors, si l’IA de Google promet rapidité, clarté et efficacité dans la recherche, doit-on se demander quels sont les dommages collatéraux pour l’indépendance éditoriale, la diversité des sources et l’économie des médias sur internet ? Sous couvert d’innovation, Google prend-il le risque de façonner un web où les petites voix disparaitront au profit de réponses automatiques, optimisées – et monétisées – par la seule loi de l’algorithme ?
En fin de compte, alors que Google continue d’étendre son empire de l’IA et de la recherche, une question cruciale accroche tous les esprits : sommes-nous en train d’échanger la richesse et la diversité du web ouvert contre une expérience toujours plus centralisée, guidée – et filtrée – par un seul acteur ?
Source : Techcrunch
