La ruée vers l’intelligence artificielle et la numérisation effrénée de notre société posent une question fondamentale : d’où viendra l’électricité pour alimenter les monstres énergivores que sont les data centers ? Cette semaine, Google a annoncé un partenariat avec Elementl Power pour développer trois sites de réacteurs nucléaires avancés. Cet engouement soudain pour le nucléaire marque-t-il un changement de cap stratégique pour la tech face à la crise énergétique annoncée ?
L’augmentation spectaculaire des besoins énergétiques de Google, alimentée par la fièvre de l’IA, est-elle la cause de ce virage ? En 2024, Google prévoit de dépenser 75 milliards de dollars en capacité de data center, une expansion sans précédent qui alimente la concurrence dans la sécurisation de sources d’énergie fiables et abondantes. Mais le nucléaire, longtemps délaissé, est-il la solution miracle ou une prise de risque calculée ?
Le partenariat vise à développer au moins 600 mégawatts par site, soit de quoi alimenter des villes entières. Pourtant, peu d’informations filtrent sur Elementl Power : l’entreprise joue la carte de la discrétion et n’a, à ce jour, encore construit aucune centrale. Alors, pourquoi Google mise-t-il sur ce pari incertain ? S’agit-il d’une véritable stratégie industrielle ou d’une opération de communication pour rassurer marchés et investisseurs ?
Google pourrait-il devenir demain l’un des moteurs du renouveau nucléaire mondial ?
Élément intriguant, Elementl revendique une approche « agnostique » côté technologie. Autrement dit, aucun choix n’est arrêté sur le fournisseur de mini-réacteurs (SMR) : Kairos Power semble favori, mais la course reste ouverte. Les SMR fascinent la Silicon Valley, promettant production électrique 24/7 sur sites compacts et facilement industrialisables, une promesse qui séduit déjà Amazon et d’autres géants du secteur. Mais à ce jour, aucun SMR opérationnel n’existe hors de Chine… Les pionniers comme NuScale, pourtant bien avancés, se sont heurtés à la dure réalité des surcoûts et des défections partenaires.
L’ambition de Google s’inscrit-elle dans une tendance lourde de la Silicon Valley, où l’investissement dans le nucléaire nouvelle génération devient la nouvelle ruée vers l’or ? En misant sur des réacteurs de 150 à 600 MW, bien loin des 1,1 GW de nos centrales actuelles, espèrent-ils briser le plafond de verre de la rentabilité grâce aux innovations industrielles ? Ou, au contraire, sous-estiment-ils la complexité sociale, technique et réglementaire du nucléaire ?
Les enjeux sont vertigineux : alors que la planète guette l’avènement d’une énergie propre et stable, la tech prendra-t-elle le leadership là où États et services publics peinent à convaincre ? N’y a-t-il pas un risque de voir les mastodontes du cloud imposer leurs standards, au détriment d’un débat démocratique sur le nucléaire ?
À mesure que la course à l’IA accélère, la question devient brûlante : assisterons-nous à la naissance d’un nouveau complexe techno-industriel fusionnant Silicon Valley et industrie nucléaire ?
Source : Techcrunch