Fujifilm révolutionne-t-il encore le monde de la photo rétro en sortant un appareil numérique affichant une esthétique résolument argentique ? Tandis que de nombreux fabricants misent sur la course aux mégapixels et aux performances techniques, le nouveau Fujifilm X Half prend-il le contre-pied de cette tendance technophile ? Que cache vraiment cette drôle de boîte annoncée à 850 $ ?
D’abord, impossible de ne pas remarquer les choix audacieux de Fujifilm : pourquoi une résolution modeste de 18 mégapixels, et pourquoi n’utiliser que la moitié d’un capteur ? Inspiré du mythique Olympus Pen F des années 1960, le X Half reprend le format « half-frame » en numérique, proposant des photos verticales au ratio 3:4, exactement comme les Instax Mini de la marque. Fujifilm cherche-t-il à capitaliser sur la nostalgie et le look des anciennes photos argentiques que les réseaux sociaux s’arrachent ?
Afin de renforcer l’esthétique vintage, le X Half ne propose que des images JPEG, bannissant le format RAW, et affiche en permanence sur son écran arrière les treize modes de simulation de film. Mais suffit-il d’un simple écran rétro et d’effets numériques tel que « light leak » ou « expired film » pour séduire les amateurs d’argentique ? Et à qui s’adresse réellement ce produit, à mi-chemin entre le jouet de luxe et le gadget glorifié ?
Fujifilm parie sur la montée de la nostalgie numérique pour séduire une nouvelle génération de photographes, mais s’agit-il d’un vrai retour vers l’authenticité ?
Le réalisme de l’expérience photo ne s’arrête pas là. Le mode « Film Camera » va plus loin en limitant la prise de vue à un strict viseur optique, imposant au photographe d’actionner un levier pour avancer chaque cliché et de patienter avant de découvrir la fameuse « planche-contact » via l’application mobile dédiée. Est-ce une simple opération marketing ou une tentative sincère de réconcilier génération smartphone et pratiques photographiques anciennes ?
La X Half propose aussi des fonctionnalités « artistiques » inattendues, comme la possibilité de superposer deux clichés, ou d’opter pour des formats vidéo verticaux et carrés parfaits pour TikTok et Instagram. Fujifilm répond-il cependant à un véritable besoin ou ne fait-il qu’enjoliver l’expérience d’un appareil photo somme toute limité techniquement ? Le placement tarifaire, élevé (près de 850 $), interroge également pour un produit qui vise avant tout le fun et la spontanéité, tandis qu’un appareil Instax ou une vraie caméra argentique coûtent souvent deux à trois fois moins cher.
Compacité oblige, le X Half se glisse facilement dans une poche, pèse à peine 210 grammes, arbore un viseur optique (bonjour parallaxe !), propose un flash intégré, une autonomie de 880 prises de vues et un lecteur de carte SD. Un arsenal suffisant pour convaincre les influenceurs et amoureux d’ambiances rétro ?
En définitive, le Fujifilm X Half interroge sur le pouvoir d’attraction de la nostalgie dans la photographie moderne : est-ce un jouet de luxe pour collectionneur, une future star des réseaux ou l’incarnation d’une vraie tendance de fond ? À l’heure du tout-immédiat numérique, la promesse d’attendre le « développement » d’une photo pourrait-elle vraiment séduire et imposer un nouveau rythme à notre frénésie visuelle ?
Source : Engadget
