La révolution de l’énergie de fusion est-elle à nos portes ou sommes-nous encore prisonniers de promesses inabouties et de milliards investis ? TAE Technologies, pionnière autoproclamée de la fusion, vient d’annoncer une nouvelle levée de fonds impressionnante : 150 millions de dollars supplémentaires de la part de géants tels que Google, Chevron, et New Enterprise Associates. Mais que révèle vraiment l’enthousiasme continu des investisseurs pour une entreprise qui court après ses ambitions depuis près de 30 ans ?
Comment TAE, autrefois connue sous le nom de Tri Alpha Energy, a-t-elle réussi à maintenir l’attention (et la confiance) de la Silicon Valley et des géants de l’énergie malgré l’absence encore aujourd’hui d’électricité fusionnée ? On compte pas moins de 12 tours de table, totalisant 1,8 milliard de dollars selon PitchBook, ce qui en fait l’une des start-up les mieux financées du secteur. Faut-il voir dans cette manne persistante le signe d’une avancée enfin tangible, ou bien s’agit-il d’un énième cycle d’attente et d’effet d’annonce ?
TAE est longtemps restée discrète sur son procédé, intriguant les ingénieurs et la communauté scientifique avec sa technologie singulière : au départ, elle utilisait deux sphères de plasma propulsées l’une contre l’autre, avant de faire tourner le tout à l’aide de faisceaux de particules. Mais en avril dernier, l’entreprise a affirmé ne plus avoir besoin de cette étape coûteuse – un bouleversement censé rendre ses réacteurs plus petits, abordables, et plus simples à opérer. Sommes-nous face à la vraie rupture technique tant attendue ou à une optimisation de plus dans un secteur qui multiplie les annonces chocs ?
L’écart entre la prouesse expérimentale et la réalité industrielle reste immense, mais l’argent et l’IA pourraient-ils enfin combler ce fossé ?
Quel rôle joue Google dans cette odyssée ? Loin d’être un simple investisseur, le géant du numérique travaille avec TAE depuis 2014, mettant à disposition ses experts en intelligence artificielle. Grâce au machine learning, le temps d’optimisation d’une expérience a été réduit de deux mois… à seulement quelques heures ! Est-ce là l’exemple parfait de la synergie entre big tech et industrialisation de la science, ou une dépendance inquiétante vis-à-vis des algorithmes pour innover ?
TAE vante aujourd’hui la capacité de son réacteur à chauffer le plasma à 70 millions de degrés Celsius. Mais l’entreprise vise beaucoup plus haut : il lui faudra atteindre le milliard de degrés pour rendre la fusion commercialement viable. Ce bond en avant est-il réaliste, ou est-ce encore une course de longue haleine, où chaque palier franchi cache de nouveaux défis techniques ?
Certains pourraient se demander si l’annonce récente – et la promesse de lever encore 50 millions de dollars prochainement – n’est qu’une manière habile de maintenir la flamme et d’assurer la survie jusqu’à la décennie prochaine. L’objectif officiel ? Mettre de l’électricité « fusionnée » sur le réseau dans le courant des années 2030. Mais combien d’investisseurs sont prêts à patienter encore une décennie, face à la pression croissante de la crise énergétique et climatique ?
Alors que la course mondiale à la fusion bat son plein, TAE Technologies saura-t-elle transformer ses percées en un changement concret pour le quotidien, ou cette levée de fonds record n’est-elle qu’un épisode de plus dans une saga scientifique sans fin ?
Source : Techcrunch