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Credits image : Ashes Sitoula / Unsplash

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Le jeu vidéo « Relooted » peut-il vraiment influer sur la restitution des trésors africains ?

Peut-on restituer le patrimoine africain simplement en jouant à un jeu vidéo ? Quand la réalité du pillage colonial rencontre la fiction ludique, que peut-on apprendre de cette expérience, et surtout, qui en seront les véritables bénéficiaires ? Ces questions dérangeantes sont posées, en filigrane, par le nouveau jeu vidéo sud-africain Relooted du studio indépendant Nyamakop.

Imaginons un futur où les puissances occidentales promettent de rendre les œuvres d’art africaines volées. Mais que se passe-t-il lorsque ces engagements demeurent lettre morte ? Dans Relooted, le joueur incarne un groupe hétéroclite de Johannesburg, déterminé à dérober ces trésors cachés dans des collections privées occidentales pour les restituer à leurs terres d’origine. Le jeu se compose de missions : briefing sur l’objet à récupérer, stratégie d’infiltration, puis cambriolage. Mais la tension monte d’un cran lorsque, une fois l’artefact récupéré, le compte à rebours commence pour s’échapper. Cette mécanique rappelle à quel point chaque vol d’œuvre d’art fut, historiquement, un acte bien réel de violence culturelle.

Mais pourquoi tant d’artefacts africains se trouvent-ils encore hors du continent ? Selon Sithe Ncube, productrice du jeu, la réponse est glaçante : « 90 % du patrimoine culturel d’Afrique subsaharienne se trouve en Occident », citant un rapport phare de 2018. Combien de ces millions d’objets – parfois même des restes humains – finiront-ils par retrouver leur place ? Le jeu pose indirectement cette question, alors même que chaque objet à voler dans Relooted (il y en a 70, tous inspirés de véritables artefacts aujourd’hui exposés ou stockés loin de leurs origines) vient rappeler la réalité de ce pillage à grande échelle.

Un jeu vidéo peut-il réparer une injustice historique, ou ne fait-il que la mettre en lumière ?

Le parcours du studio Nyamakop interroge aussi sur la place des créateurs africains dans l’industrie mondiale du jeu vidéo. Ben Myres, l’un des fondateurs, expliquait déjà en 2018 que « l’entrée dans le jeu vidéo indépendant en Afrique du Sud, c’est comme escalader une falaise » : manque de contacts, absence de représentation des grandes plateformes, marché local limité. Fallait-il, comme il l’a fait, voyager sans relâche pour convaincre les Occidentaux ? Le succès du studio avec Semblance – première licence africaine sur une console Nintendo – montre la ténacité nécessaire. Mais la légitimité créative doit-elle forcément passer par la reconnaissance occidentale ?

Aujourd’hui, fort d’une trentaine de développeurs, Nyamakop affirme une identité résolument africaine, portée par une équipe majoritairement racisée et des thèmes assumés. Pourtant, comme le souligne Sithe Ncube, faire des jeux « pour les Africains » reste un défi : « Si l’on crée des jeux destinés à l’Afrique, y aura-t-il réellement un public pour les consommer, alors que la plupart jouent déjà à des productions occidentales ? » Le marché africain du jeu vidéo serait-il encore en friche, ou simplement invisible aux yeux des grandes plateformes mondiales ?

Avec une sortie prévue sur Steam, Epic Games Store et Xbox, mais sans date ferme, Relooted attire déjà les regards. Simple divertissement, ou acte militant ? Ce jeu réussi-t-il à redonner une voix aux cultures spoliées, ou ne fera-t-il que raviver le spectre de leur exil ? Finalement, la restitution symbolique par le jeu vidéo saura-t-elle provoquer des changements dans la réalité ?

Dans ce contexte, Relooted ne pose pas qu’un défi virtuel : il catalyse une réflexion urgente sur la mémoire, la représentation, et le pouvoir de la création culturelle africaine contemporaine. Mais la question demeure : le virtuel peut-il influencer la réalité, ou se contente-t-il d’agiter une vérité encore trop ignorée ?

Source : Engadget

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