Comment une entreprise technologique peut-elle conquérir le box-office après tant de déboires au cinéma ? Apple, après de nombreux essais prudents, signe enfin un succès commercial, mais ce tournant est-il le fruit d’un réel savoir-faire ou d’un simple coup de chance ?
Il n’y a pas si longtemps, la stratégie cinématographique d’Apple semblait incertaine. Alors que Netflix dépensait des millions pour ses campagnes aux Oscars, seul « Coda » d’Apple avait ramené une statuette à la maison pour le compte d’un service de streaming. Mais est-ce que le prestige suffit à séduire le grand public et à remplir les salles ? Pas vraiment : jusqu’à récemment, les sorties cinéma d’Apple, coûteuses et ambitieuses, faisaient pâle figure. Le fiasco d’« Argylle » a-t-il poussé Cupertino à revoir sérieusement ses plans ?
Avec « F1 », la donne vient de changer : le film truste la première place du box-office américain et engrange 144 millions de dollars à l’international, talonnant « Napoleon » pour devenir le plus grand succès d’Apple. Cette réussite tient-elle à la formule éprouvée de Joseph Kosinski, le réalisateur de « Top Gun: Maverick », ou à la véritable passion du public pour la Formule 1, dopée par la série documentaire de Netflix ? On notera que Brad Pitt, acteur principal, conduit vraiment sur circuit, apportant un supplément d’authenticité spéculé.
Mais la recette ne serait-elle pas plus complexe ? Outre l’engouement pour la F1 et le casting prestigieux, la collaboration avec Warner Bros. et le producteur Lewis Hamilton ajoute une dimension inédite à ce projet. Apple mise aussi sur sa technologie maison pour capturer la vitesse et l’adrénaline, tandis que Tim Cook en personne orchestre une campagne où l’écosystème Apple se met au service du film — au risque d’agacer certains fidèles de la marque.
Un blockbuster peut-il vraiment transformer une ambition technologique en triomphe culturel ?
Au-delà de la performance commerciale, une question persiste : ce succès suffira-t-il à faire oublier les hésitations stratégiques de l’année dernière, quand projets annulés et budgets revus à la baisse semaient le doute chez les réalisateurs ? Apple assoit peut-être enfin sa légitimité à Hollywood, mais la réussite sur grand écran reste précaire et dépendante de multiples facteurs imprévisibles.
Et si ce film n’était qu’une vitrine ? Malgré l’engouement actuel, des analystes avancent que « F1 », avec ses plus de 200 millions de dollars de budget, risque d’être, financièrement, davantage un gigantesque spot publicitaire pour Apple TV+ qu’une licence rentable. À terme, Apple sera-t-il disposé à risquer autant pour chaque projet futur, ou ce coup d’éclat marque-t-il l’exception qui confirme la règle ?
Apple doit-il capitaliser sur cette victoire ou repenser complètement sa façon d’intégrer le cinéma à son empire médiatique ?
Source : Techcrunch
