Dans le monde en perpétuelle ébullition des fintechs, une question s’impose : que deviennent les petites startups innovantes lorsqu’elles se font racheter par des mastodontes du secteur ? En ces jours où chaque application promet l’autonomie financière ou la sécurité de l’avenir, l’acquisition de la plateforme familiale d’investissement EarlyBird par le géant de l’épargne Acorns intrigue et soulève d’innombrables interrogations.
EarlyBird, lancée en 2019, permettait à chaque parent, proche ou ami d’offrir des investissements à un enfant, accompagnés d’une « capsule temporelle » numérique faite de souvenirs vidéos. Mais alors que la promesse semblait convaincre bon nombre de familles soucieuses du futur économique de leurs enfants, le rideau tombe brusquement : EarlyBird ferme, ses utilisateurs ont jusqu’au 23 juin pour récupérer leurs fonds. Pourquoi un tel arrêt si soudain ? Et surtout, le passage dans le giron d’Acorns n’annonce-t-il pas une nouvelle ambition plus large pour la finance familiale en ligne ?
L’opération n’a rien d’anodin : Jordan Wexler, co-fondateur d’EarlyBird, met en avant une volonté de changer la façon dont les familles bâtissent leur « héritage » pour leurs enfants. Mais le rachat par Acorns ne risque-t-il pas d’écraser l’esprit communautaire et la personnalisation du concept originel au profit d’une stratégie produit typique des grandes plateformes ? Dans une industrie où les rapprochements récurrents riment souvent avec uniformisation, les clients peuvent s’interroger. Les fondateurs d’EarlyBird, Wexler et Caleb Frankel, rejoignent néanmoins Acorns pour renforcer le développement d’Acorns Early, une application éducative proposée avec une carte bancaire pour enfants et adolescents. La fusion des expertises changera-t-elle vraiment la donne ?
La disparition d’EarlyBird marque-t-elle la fin ou la transformation d’une nouvelle culture de l’épargne transgénérationnelle ?
Pour les familles déjà investies avec EarlyBird, la transition s’avère être un saut incertain : il faut retirer l’argent et ouvrir un nouveau compte chez Acorns. Pour adoucir la pilule, l’accès à « Acorns Gold » – l’offre premium à 12 dollars par mois – sera gratuit pendant un an. Mais ce geste suffira-t-il à rassurer des utilisateurs qui perdent une solution pensée pour tisser des liens mémoriels et financiers entre générations ? D’autant que la capsule vidéo sera a priori intégrée ultérieurement, laissant planer le doute sur l’identité du service final.
Du point de vue d’Acorns, l’acquisition s’inscrit dans un mouvement de concentration, alors que la société double ses abonnés sur Acorns Gold, ambitionnant de devenir le référent du bien-être financier familial. Mais à quel prix cette croissance soudaine et intégrative s’opère-t-elle pour les startups qu’elle engloutit ? Une question fondamentale demeure : la finance du futur doit-elle privilégier la taille et la « scalabilité », ou conserver un supplément d’âme communautaire et innovant ?
Faut-il conclure que la personnalisation et l’attention portée aux familles sont inévitables victimes collatérales des fusions-acquisitions dans la fintech, ou assistera-t-on, grâce aux synergies promises par les dirigeants d’Acorns, à la naissance d’un service réellement pensé pour toutes les générations ? Enfin, quelles garanties pour les familles qui souhaitent construire l’avenir de leurs enfants, tout en gardant le contrôle et la mémoire de leurs actes d’investissement ?
Au-delà de la cessation d’un service original, l’acquisition d’EarlyBird par Acorns pose la question : peut-on encore espérer une autre façon d’épargner et d’investir ensemble à l’ère des géants de la fintech ?
Source : Techcrunch
