Comment deux anciens de la tech ont-ils réussi à bousculer les codes de la santé à domicile aux États-Unis? L’histoire de Sprinter Health soulève de nombreuses questions sur les enjeux actuels des soins de santé, en particulier après la pandémie.
En 2020, Max Cohen et Cameron Behar, tous deux issus de Google et Facebook, se sont lancés dans un secteur qui, à première vue, leur était totalement étranger : la santé. Pourquoi choisir ce domaine sans y avoir d’expérience? Qu’ont-ils vu que tant d’autres ont négligé? Malgré l’essor de la télémédecine pendant la pandémie, les deux entrepreneurs identifient une limite importante : tout ne peut pas se faire derrière un écran.
En écoutant le besoin criant de soin à domicile pour des actes médicaux essentiels – prises de sang, dépistages du diabète ou encore examens du cancer colorectal – ils créent Sprinter Health. Leur but? Réengager ces millions d’Américains délaissés par le système de santé traditionnel, qui évitent les visites médicales mais restent vulnérables face à la maladie. Peut-on sérieusement repenser la santé préventive sans sortir du modèle hospitalier?
Sprinter Health mise sur la logistique technologique pour rendre la santé à domicile efficace et rentable, là où beaucoup ont échoué.
En quatre ans, la croissance de Sprinter Health est fulgurante : de cinq à dix-huit États desservis, un chiffre d’affaires multiplié par six en un an, et surtout, une série B de 55 millions de dollars menée par General Catalyst, avec la participation de partenaires de poids comme Andreessen Horowitz ou Google Ventures. Ce n’est pas un hasard, car leur « sauce secrète » est un système logistique qui optimise itinéraires et plannings des professionnels de santé sur le terrain. Comment ont-ils rendu possible ce que d’autres startups ont échoué : envoyer efficacement des humains chez les patients, tout en conservant un modèle économique viable?
Leur technologie va jusqu’à simuler les conditions de circulation, la météo ou encore le stationnement, permettant à chaque « sprinter » – les assistants médicaux de l’entreprise – de visiter jusqu’à 12 patients par jour. Le temps passé sur la route, si coûteux pour tant d’entreprises du secteur, devient chez eux un détail maîtrisé. Julie Yoo, associée chez Andreessen Horowitz, n’hésite pas à comparer leur modèle à celui d’Instacart ou DoorDash, insistant sur la nécessité « d’avoir des systèmes d’exploitation ultra-efficaces » pour survivre sur le long terme.
Ce qui interpelle aussi, c’est la gratuité des services pour les membres des mutuelles partenaires, notamment Medicare et Medicaid. En agissant ainsi, Sprinter Health s’attaque-t-il à une inégalité souvent dénoncée dans le milieu médical américain? Ou prend-t-il le risque de dépendre des géants de l’assurance, au péril de son indépendance ?
L’émergence rapide de Sprinter Health laisse imaginer un futur où la médecine préventive irait à la rencontre des patients, et non l’inverse. Mais face à des défis logistiques et économiques redoutables, cette réussite pourra-t-elle se confirmer à grande échelle? Le pari de la tech dans la santé mérite-t-il vraiment la confiance de patients toujours plus exigeants?
Source : Techcrunch