Quelle est la véritable stratégie derrière la dernière hausse de prix et la restructuration des abonnements chez Spotify ? Depuis des mois, la plateforme musicale fait couler beaucoup d’encre, tant du côté des consommateurs que de celui des créateurs, mais que cherchent vraiment ses dirigeants en bouleversant ainsi leur offre Premium ? S’agit-il d’une simple évolution commerciale, ou bien d’une opération plus douteuse visant à maximiser les profits sur le dos des artistes et des abonnés ?
Deux sénateurs américains, Marsha Blackburn et Ben Ray Luján, viennent de demander à la Federal Trade Commission d’ouvrir une enquête sur les méthodes de Spotify. Leur accusation ? La société aurait converti automatiquement ses abonnés Premium vers une formule plus chère, incluant des livres audio, sans obtenir leur consentement explicite. Pourquoi un tel empressement à regrouper musique et audiobooks dans un même forfait payant ? Est-ce un simple souci d’enrichir le catalogue, ou un moyen d’exploiter les failles réglementaires et de baisser d’autant les redevances versées aux ayants droit ?
En effet, selon la législation américaine, lorsqu’un abonnement musical est « bundled » avec un autre produit numérique, le taux de royalties payé aux créateurs peut en théorie être réduit. Spotify profiterait-il de cette brèche légale pour augmenter sa marge, au détriment des artistes déjà fragilisés ? Les opposants à la plateforme dénoncent une manœuvre cynique : « Spotify semble vouloir avant tout réduire les royalties statutaires dues aux auteurs et éditeurs, ce qui nuit à la fois à la communauté créative et aux consommateurs », affirment les sénateurs. Mais dans cette affaire, qui défend vraiment l’intérêt du public ?
La nouvelle structure tarifaire de Spotify relance le débat sur l’équilibre entre innovation technologique et protection des créateurs.
Spotify, de son côté, se défend d’imposer quoi que ce soit et rappelle que les abonnés ont reçu une notification concernant la hausse de prix un mois à l’avance. Mais qui lit vraiment chaque courriel marketing dans sa boîte ? Peu de gens semblent avoir réalisé qu’il fallait « opt-out » — soit refuser activement la nouvelle offre — sous peine de basculer automatiquement sur la formule à 12 dollars par mois (et jusqu’à 20 dollars pour un abonnement famille). Cette « astuce » du consentement tacite laisse perplexe. Comment expliquer ce manque de clarté et pourquoi forcer la main aux abonnés ?
Du côté des créateurs, la colère monte. Selon la National Music Publishers’ Association, la nouvelle politique de Spotify pourrait coûter jusqu’à 230 millions de dollars de pertes de revenus pour les éditeurs la première année. La plateforme abuse-t-elle de sa position dominante pour écraser davantage les artistes et retirer encore plus de valeur de la chaîne de création musicale ?
L’an dernier, la Mechanical Licensing Collective avait déjà tenté d’obtenir réparation devant les tribunaux pour sous-paiement présumé de royalties. Mais la justice n’a pas donné suite. Faudra-t-il une mobilisation plus large, ou une intervention politique pour rééquilibrer ce rapport de force ?
En dernière analyse, cette polémique traduit-elle l’échec du modèle du streaming à garantir un équilibre équitable pour tous ? Ou bien les changements proposés par Spotify sont-ils un simple avant-goût de l’évolution inévitable du secteur ?
Source : Techcrunch