Le monde du jeu vidéo est-il prêt à accueillir une nouvelle révolution orchestrée par l’intelligence artificielle ? Alors que l’IA s’insinue dans de nombreux secteurs, la startup Runway, déjà connue pour ses collaborations avec AMC Networks et Lionsgate dans l’audiovisuel, affirme vouloir conquérir l’industrie vidéoludique. Mais quelles ambitions se cachent vraiment derrière le lancement annoncé de leur nouvelle plateforme, Game Worlds ?
Selon The Verge, Game Worlds permettra prochainement aux utilisateurs de Runway de concevoir des jeux interactifs reposant sur la génération automatique de textes et d’images par IA. Simple gadget ou prémices d’une transformation profonde ? Pour l’instant, la plateforme se limite à la création d’ébauches visuelles et narratives. Alors, Runway n’est-elle qu’au balbutiement d’une technologie qui s’apprête à bouleverser la manière de créer des univers ludiques ?
Cristóbal Valenzuela, PDG de Runway, ne cache pas ses ambitions : il promet déjà que « les jeux vidéo générés par l’IA arriveront plus tard cette année ». La startup espère attirer les studios de jeux grâce à ses outils, en échange d’un accès à leurs bases de données pour entraîner son IA. Mais cette intégration de plus en plus poussée de l’intelligence artificielle dans le game design inquiète. N’a-t-on pas déjà vu des professions s’insurger contre l’automatisation, les doubleurs du syndicat SAG-AFTRA allant jusqu’à la grève pour défendre leur image face à l’IA ?
À l’heure où certains voient l’IA comme une chance, d’autres dénoncent une menace sur la créativité humaine et la propriété intellectuelle.
Runway, justement, n’échappe pas à la controverse. L’entreprise est accusée d’avoir entraîné ses modèles sur des milliers de vidéos YouTube et des films piratés, au mépris des règles d’utilisation. Malgré ces polémiques, elle tente d’appliquer les recettes de son succès dans l’audiovisuel – où elle produit déjà des outils de prévisualisation et des supports promotionnels – à un nouveau marché. L’histoire moderne du jeu vidéo prouve que l’usage de l’IA générative n’est pas neuf : Ubisoft, par exemple, génère déjà des dialogues grâce à son outil Ghostwriter. Runway arrivera-t-elle à séduire une industrie où la méfiance le dispute à la fascination ?
La question se pose alors : le monde du jeu vidéo doit-il ouvrir grand les portes à ces technologies disruptives ou s’en méfier ? Si l’intelligence artificielle promet des innovations majeures dans la création et la conception d’univers interactifs, elle soulève aussi des questions brûlantes sur l’originalité, la rémunération des créateurs humains et la protection des droits d’auteur. Le public, quant à lui, est-il prêt à accepter des jeux conçus en partie par des machines aux inspirations parfois discutables ?
Reste à savoir si l’entrée de Runway dans le jeu vidéo marquera le début d’un nouvel âge d’or, celui des créateurs et des joueurs augmentés par l’IA, ou une étape de plus vers une standardisation numérique. Les studios partenaires, séduits par la promesse d’une production accélérée et d’une créativité démultipliée, prendront-ils le risque de miser sur l’automatisation au détriment de l’authenticité ? Où trace-t-on la frontière entre l’innovation et la dérive ?
Finalement, à l’heure où la bataille autour du contrôle des données et de la créativité fait rage, la véritable question n’est-elle pas : sommes-nous arrivés à l’aube d’une génération de jeux vidéo véritablement “artificiels” ? Jusqu’où l’industrie saura-t-elle préserver l’équilibre entre avancée technologique et respect de l’humain ?
Source : Engadget
