Strava cherche-t-elle à devenir le géant incontournable de l’entraînement sportif connecté en rachetant Runna ? L’application américaine, déjà leader dans le suivi d’activité physique, a récemment mis la main sur cette pépite britannique spécialisée dans les plans d’entraînement de course personnalisés. Mais derrière cette opération, se cache-t-il un simple effet de mode ou une réelle volonté de transformer l’accompagnement des sportifs à l’ère digitale ?
Pourquoi Strava s’intéresse-t-elle spécifiquement à la course à pied, alors que la plateforme agrège déjà des milliards de données d’efforts à travers le monde ? Selon son PDG, Michael Martin, la dynamique est claire : près d’un milliard de courses ont été enregistrées sur Strava en 2024, et 43 % de ses membres veulent participer à un grand événement cette année. La fusion avec Runna, reconnue pour ses programmes adaptés à chaque coureur, répond donc à un appétit mondial croissant pour l’amélioration et la personnalisation des performances.
Cette stratégie se joue également sur le terrain de l’innovation. En 2023, Strava a multiplié les nouveautés – plan familial, cartes de chaleur nocturnes pour plus de sécurité… L’acquisition de Runna s’inscrit-elle dans cette logique d’expansion rapide ? Ou Risque-t-elle de noyer l’identité originale des deux services face au rouleau compresseur de l’industrie tech ? Il est intéressant de noter que, pour l’instant, Strava promet de garder Runna comme application indépendante, tout en prévoyant de renforcer ses équipes et moyens.
L’ambition affichée laisse perplexe : Strava peut-elle réellement bouleverser l’accompagnement sportif numérique sans trahir ses valeurs fondatrices ?
Lancée seulement en 2022, Runna compte déjà 180 salariés et une présence dans autant de pays, preuve de son attractivité et de la viralité de sa vision. Strava mise donc sur une synergie de compétences, mais le mariage de deux interfaces – et de deux philosophies d’entraînement – ne risque-t-il pas de brouiller les utilisateurs ? Comment allier le coaching individualisé de Runna et la dimension communautaire, voire compétitive, de Strava sans créer une expérience trop complexe ou peu lisible ?
Cette acquisition pose également la question de la valorisation des données personnelles de santé et d’entraînement. Avec la consolidation de deux bases utilisateurs massives, quelles garanties Strava apportera-t-elle sur la confidentialité, alors même que la personnalisation – synonyme d’analyses toujours plus fines – repose sur l’exploitation intensive de ces données ?
Strava et Runna poursuivent-elles un simple rêve de croissance, ou anticipent-elles une mutation de nos façons de nous entraîner, où l’humain et l’algorithme coécrivent le sport de demain ? L’heure est-elle vraiment au « tout personnalisé » au détriment des échanges et de la motivation collective ? Une chose est sûre : le marché attend de voir si ce mariage sera celui de la raison ou du marketing.
En réunissant leurs forces, Strava et Runna ambitionnent de redéfinir la façon dont les coureurs s’entraînent, échangent et progressent, mais ce duo sera-t-il à la hauteur des attentes de millions de sportifs connectés ?
Source : Engadget