Pourquoi AMD a-t-elle jeté son dévolu sur Enosemi, une jeune startup californienne à peine fondée, spécialisée dans la photonique sur silicium ? Faut-il voir dans cette opération le signal d’une mutation profonde dans l’industrie des puces et des solutions pour l’intelligence artificielle ? À l’heure où la vitesse de transmission des données devient cruciale, quelles stratégies déploient les géants du secteur pour garder une longueur d’avance ?
L’acquisition d’Enosemi par AMD, annoncée mercredi dernier, intrigue de par sa discrétion : aucun détail financier n’a filtré. Face à la montée en puissance de la photonique, cette technologie qui remplace l’électron par le photon pour transmettre l’information, AMD pense-t-elle trouver ici le chaînon manquant pour accélérer la performance des futures architectures IA ? Rappelons qu’en 2023, AMD collaborait déjà en R&D avec des startups taïwanaises pour explorer les frontières du secteur. Est-ce une chasse mondiale à l’innovation qui s’orchestre sous nos yeux ?
Pour Brian Amick, vice-président chez AMD, l’enjeu est limpide : « À mesure que les modèles d’IA gagnent en taille et en complexité, il devient impératif d’accélérer le transfert de données ». Enosemi n’est pas un inconnu pour AMD : la startup, cofondée par Ari Novack et Matthew Streshinsky, œuvrait déjà comme partenaire externe sur des projets photoniques. Intégrée au groupe, la jeune pousse devrait selon AMD stimuler immédiatement la production de circuits photoniques et de solutions d’optique co-packagée à l’échelle industrielle.
L’intégration d’Enosemi traduit la nécessité pour AMD de parier sur de nouvelles technologies pour rester dans la course à l’IA.
Mais que fabrique concrètement Enosemi ? Cette équipe de la Silicon Valley, composée de seulement 16 employés en mai dernier, développe des circuits intégrés photoniques, permettant d’associer pour la première fois calcul et réseau à l’intérieur même des centres de données. Leur atout ? Des interconnexions optiques ultra-rapides, indispensables pour supporter l’avalanche de données propre à l’IA générationnelle d’aujourd’hui et de demain.
À peine sortie de l’ombre grâce à un modeste financement initial de 150 000 $ et adossée à des fonds comme le New Mexico Vintage Fund, Enosemi voit désormais l’un de ses cofondateurs, Ari Novack, rejoindre officiellement le giron AMD en tant que spécialiste de la conception sur silicium. Faut-il y lire un signe de la montée en puissance fulgurante des petits acteurs dans la révolution photonique ?
Ce rachat signe également le retour d’AMD sur le devant de la scène après l’énorme rachat de ZT System (près de 5 milliards de dollars), dont il vient de se séparer de la branche fabrication de serveurs pour 3 milliards. Un remaniement stratégique ? Ces derniers mois, le groupe affirme vouloir investir massivement sur le terrain de l’IA : en 2024, la branche a généré 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires selon sa PDG Lisa Su, un record symbolique pour la firme.
Ces signaux indiquent-ils une redistribution profonde des cartes dans l’industrie des semi-conducteurs ? AMD arrivera-t-il à transformer cette prise de risque en avantage durable pour répondre aux défis de l’intelligence artificielle ?
Source : Techcrunch