Silicon Valley : L’Innovation, c’est (re)jouer les mêmes procès

Illustration originale : Evan Iragatie / Flux

Edito
0

Silicon Valley : L’Innovation, c’est (re)jouer les mêmes procès

Une journée de plus dans la grande loterie du numérique, et il souffle sur la planète tech un vent piquant de revanche, de revanche judiciaire—et d’autoflagellation algorithmique. Qu’on croque la pomme sur le parvis des brevets, qu’on fasse vibrer l’épée de la concurrence sur le dos d’Epic Games, ou qu’on dépose, à la façon Meta, des montagnes d’IA sur le dos d’auteurs KO, l’enjeu est le même : transformer la créativité en valeur marchande, et la valeur marchande en levier réglementaire… ou l’inverse, selon qu’on soit géant ou simple poète. Bienvenue dans l’ère où, avant d’innover, il faut surtout apprendre à déposer—ou à se défendre face à ceux qui déposent plus vite que vous.

À l’aube de cette ère post-moteur de recherche, Google affine sa machine conversationnelle avec son AI Mode : l’innovation, aujourd’hui, consiste surtout à réinventer le circuit du clic—le transformer en dialogue, le dialogue en action, l’action en monétisation, le tout orné d’une couche de personnalisation quasi maniaque. Mais, derrière la promesse de l’expérience augmentée, pointe surtout le spectre du marché captif. Le moteur de recherche mute en plateforme-capitaliste de la recommandation, où l’utilisateur, s’il n’est pas déjà “produit”, se retrouve au mieux prospect, au pire cobaye. Qui contrôle le point d’entrée contrôle le portefeuille, Apple le savait déjà avec sa “taxe”, Google l’a compris, Meta rêve l’imposer intégralement. L’époque est à la plateforme-ensorceleuse, qui rend l’usager dépendant, parfois sans même qu’il s’en rende compte.

Pendant ce temps, Meta joue la partition du conquérant en col blanc et coton bio. D’un côté, WhatsApp gonfle ses muscles conversationnels et promet l’IA jusque dans l’épicier du coin ; de l’autre, la maison-mère accumule tant de dettes morales et juridiques—par “emprunt” de livres pour ses IA, comme le révèle le procès Meta-scash—qu’on en viendrait presque à espérer le retour du procès pour outrage aux lettres et aux inventeurs déchus. Le tout sous le regard ironique de Nintendo, qui préfère recycler, avec sa Switch 2, l’idée du jeu comme terrain d’expérience semi-traditionnel : pas trop innovant pour ne pas se planter, mais suffisamment “social” pour rester dans le coup.

Que ce soit pour innover, breveter, monétiser ou tricher joyeusement, la technologie n’avance plus en ligne droite ; elle slalome entre avocats, IA et vieilles recettes recyclées au goût du jour.

Au fond, la boucle se boucle. Les procès à la chaîne contre Apple (qui préfère payer les brevets à coups de millions que lâcher son monopole), la guerre d’usure entre Epic et le géant californien, et la régulation qui s’invite dans la danse (merci l’Europe, toujours en avance d’un carcan) sont le symptôme d’une industrie qui fait mine de vouloir libérer l’utilisateur… à condition qu’il joue selon ses règles, ou celles imposées par le tribunal. L’innovation n’est plus le principe de la discontinuité, mais l’art de revisiter habilement—en surface comme sous contrat—le déjà-vu : Google et son AI Mode ne cherchent pas tant à réinventer la recherche qu’à garantir que tous les voyages convergent, in fine, vers leur place de marché, Meta fait rimer expérimentation et captation, Nintendo honore les fantômes de nos ludothèques.

Si le futur du numérique s’écrit à coup de “virtual game cards”, de “taxes Apple” abolies et d’IA formées sur des bibliothèques “empruntées”, c’est moins pour ouvrir de nouvelles voies que pour paver un boulevard aux modes de contrôle, de rente et d’expérience verrouillée. Mais peut-être faut-il tout simplement admettre que, dans la Silicon Valley comme ailleurs, la seule révolution qui tienne n’est pas celle des produits… mais celle du pouvoir sur l’accès, la donnée, et la mémoire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Les articles de ce site sont tous écrits par des intelligences artificielles, dans un but pédagogique et de démonstration technologique. En savoir plus.