L’actualité tech de la semaine ressemble à un immense bal masqué où la frontière entre révolution et illusion se brouille plus que jamais. Chaque acteur avancant masqué sous le couvert d’innovation : Microsoft rêve de transformation avec sa Command Palette sur Windows, Google parade avec Gemini et Gemini parade avec Google, tandis que les titans du hardware se donnent rendez-vous à Computex pour jouer à qui aura la puce la plus musclée… au fond, on se demande parfois si l’IA ne finit pas par tout réduire à des concours de taille de pipeline.
La grande messe des annonces — qu’elles s’appellent Google I/O, Computex ou Memorial Day (oui, même la fête du rabais est tech-centrée !) — n’est finalement qu’une déclinaison marketing : des palettes de commandes pour tout, de la productivité Windows jusqu’à la chasse au gadget ultra-fonctionnel vendu à la découpe et à la minute. Sous les promesses de magie algorithmique, la réalité est brute : on nous vend — à grand coup de festivités commerciales — un paradigme toujours plus modulaire, hyperconnecté, prêt à forcer son adoption, quitte à ce que seul le buzz reste palpable à la fin du mois.
Mais qui tire véritablement les ficelles de cette mythologie du progrès ? Ce n’est pas un hasard si, derrière les grandes scènes, la géopolitique s’invite à la fête : la guerre froide du cloud et de l’IA se joue entre Dubaï et les datacenters du Texas, sous l’œil suspicieux de la Silicon Valley devenue à la fois fournisseur officiel du Pentagone et arbitre de l’éthique nationale (l’État américain : terrain de jeu ou laboratoire du pire ?). La bataille pour le contrôle du logiciel, du matériel et du code se livre bien plus dans les coulisses que sur la scène accessible via la touche Win + Alt + Espace. Même l’Union européenne oscille entre sursis règlementaire et fantasme de “supercycle” tech, avec ce soupçon d’arythmie réglementaire qui ferait presque rire jaune Sonali De Rycker.
Entre coups marketing, géants à la manœuvre et faux débats sur “l’innovation”, ce n’est pas l’IA qui gouverne la tech, mais le storytelling de ceux qui possèdent la télécommande du progrès.
Et l’utilisateur dans tout ça ? Poussé d’une promotion à l’autre – soldes-maniaques du Memorial Day ou chasse à l’“optimisation” de la moindre extension Windows – il parcourt un Internet devenu road trip collectif (le vrai jeu collaboratif, c’est Google Street View, pas la dernière keynote d’un PDG sous stéroïdes). Chacun invente la pseudo-révolution du software à la minute, la vraie innovation se cache parfois là où on l’attend le moins — chez les petits indé (coucou les jeux indie) ou dans l’art de la débrouille spatiale à la mode Voyager 1.
L’avenir technologique, à force d’être piloté par des “palettes de commande” surpuissantes et des adjudants du code, ressemble à une course où le plus grand risque n’est plus l’échec technique, mais l’épuisement de notre capacité à discerner ce qui importe vraiment. Cette ère d’innovation à la chaîne — hardware, software, réglementaire et jusqu’à la médecine diagnostique — pose toujours la même question : à trop vouloir accélérer, qui prendra encore le temps de se demander si cette direction est la bonne ? Après tout, dans la tech, la vraie révolution reste à venir : celle qui parviendra à relier génie humain, éthique et imagination… sans nous refourguer l’abonnement inutile en promo.