Scaling, pillage & IA : la grande lessive du progrès

Illustration originale : Evan Iragatie / Flux

Edito
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Scaling, pillage & IA : la grande lessive du progrès

L’heure n’est plus au simple choc des technologies, mais bien à une grande lessive où chaque secteur, du roman autoédité à la conquête stellaire, se fait secouer par une centrifugeuse algorithmique. À commencer par Meta, tel un collectionneur boulimique d’esprits IA, qui pour compenser la fadeur de ses Llama récents, pioche goulûment dans les meilleures têtes d’OpenAI. Même les chercheurs n’ont plus le luxe de l’anonymat : ils deviennent les NFTs vivants de la grande blockchain du recrutement, épiés, traqués, chassés, valorisés plus que la plupart des stablecoins. Une version, humaine, des « loot boxes » tant décriées dans le jeu vidéo – sauf qu’au lieu de vous filer un skin doré, elle vous offre Trapit Bansal ou Shengjia Zhao à la signature d’un chèque au montant qui s’affiche sans gêne dans la presse tech.

Il fallait s’y attendre : l’industrie ludique n’est pas en reste. Tandis que Meta drague l’élite académique, d’autres comme Runway tentent de séduire les studios en brandissant l’IA générative comme la nouvelle baguette magique du level design et du game script. Voilà le game design transformé en session d’Excel créatif boostée aux prompts, où chaque studio devient un simple donneur d’ADN créatif pour entraîner une IA, bien souvent nourrie d’œuvres piratées et de vidéos issues du dark YouTube. Qu’importe si les doubleurs font grève, si l’originalité s’effondre, si la propriété intellectuelle prend l’eau : l’industrie du jeu vidéo, elle aussi, doit “scaler”.

Et puisque tout le monde veut son bout de scaling (ou son os à ronger), la startup-économie se donne rendez-vous à Boston pour importer les recettes du “growth hacking” appliqué à la croissance humaine. Rob Biederman promet de remplacer la crise d’acné entrepreneuriale par des injections de conseils financiers, Ellen Chisa cuisine la licorne sur scène, et ceux qui ont transformé Twitter et Meta en usines à cash détaillent comment industrialiser créativité, prise de risques… et pertes d’emplois. Tout ce petit monde s’auto-congratule à Disrupt, pendant que de nouveaux acteurs comme Anthropic singent la RSE version IA en lançant des think tanks consultatifs sur l’avenir économique — sans vraiment dire QUI fera les frais de leur “new deal” algorithmique.

La tech, c’est la promesse que demain sera différent… mais pour qui, et à quel prix, chaque coalition d’acteurs joue sa partition sans symphonie commune.

Cette bouillonnante “IA-isation” n’épargne aucun domaine : Kobo, doux rebelle des auteurs indépendants, automatise résumés, mots-clés et publicités au grand désespoir des plumes inquiètes d’être gobées par la grande moulinette textuelle, tandis que Google cherche à rattraper des années de retard sur le montage vidéo mobile en tentant de convertir YouTube Create en faille potentielle de croissance au pays de CapCut et InShot (oser iOS, c’est déjà l’avouer). Pendant ce temps-là, Facebook se rêve “gardien officiel de nos souvenirs”, quémandant l’accès à nos pellicules pour entraîner ou pas, mon futur algorithme de suggestions cringes et rétrospectives d’anniversaires ratés (un consentement qui rime parfois avec captation).

La véritable métamorphose du monde numérique n’est pas qu’une prouesse technique, ni un coup de com’ à la sauce startup Nation. Elle est ce moment étrange, inédit, où créateurs, codeurs, investisseurs, talents-cibles et consommateurs se retrouvent pris dans le grand shaker d’une compétition globale, où l’innovation se confond insidieusement avec l’aliénation, où la souveraineté de nos mots, de nos idées et de nos souvenirs se négocie sans nous à coup de moratoires fédéraux ou d’amendements législatifs. Qui donc fixe, aujourd’hui, la limite entre enchantement techno et prédation généralisée — si ce n’est… l’ultime bug dans la boucle du progrès ?

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